Vendredi 23 septembre
Marisol Touraine, ministre la Santé, déclare : « Nous avons sauvé la sécurité sociale ! » Celle-ci présentait un déficit de 17 milliards à la fin du quinquennat de Sarkozy ; il ne sera plus que de 400 millions à la fin de l’année ; en équilibre sans doute à la fin du quinquennat de François Hollande. Bravo ! Mais pourquoi ne pas le clamer davantage ? Pourquoi ne pas l’avoir souligné dès l’arrivée à la présidence en 2012 ? Assumer l’héritage, ce n’est pas pour autant le masquer… Déjà, avant l’arrivée de Jospin à Matignon, au début du siècle, le « trou de la sécu » faisait peur. On le voit bien partout en Europe : les gouvernements de droite finiront par détricoter la sécurité sociale si la croissance ne revient pas suffisamment pour l’assurer. Les pensions de retraite, les allocations de chômage, les soins de santé… Combien de personnes ne les croient pas immuables, acquises une fois pour toutes, comme l’hiver succède à l’automne ? Comparer le prix d’un médicament avec et sans l’intervention de la sécurité sociale est un test révélateur. La politique, ce n’est pas que de la com’, c’est aussi, et surtout, de la pédagogie.
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Depuis une dizaine de jours, le philosophe Charles Pépin fréquente les plateaux du paysage audiovisuel afin de présenter son livre Les Vertus de l’échec. On peut saluer le travail promotionnel de son éditeur (Allary) qui, pourtant, ne joue pas dans la cour des grands. De micro en micro, Pépin répète son credo : l’échec peut être nécessaire. Et en guise d’exemples, il reprend toujours les mêmes évocations fournies par l’Histoire (De Gaulle, Churchill …) en terminant par Gainsbourg : si le Serge n’avait pas raté sa carrière de peintre, il n’aurait pas été ce génial auteur de chansons… Et il ajoute qu’il n’aurait pas connu Bardot et Birkin… Tout cela est-il bien sérieux ? C’est tellement facile de lui opposer le contraire : si Gainsbourg avait été un grand peintre… Et vient alors le terrible contrepied : Hitler aussi aurait voulu être un artiste de renom, mais il avait échoué à l’examen d’entrée de l’Académie des Beaux-arts de Vienne… Bref, on attendra le deuxième livre avant de passer un peu de temps avec ce Pépin.
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L’agréable conversation du déjeuner s’était concoctée autour d’une question lancinante que Pierre Dumayet avait autrefois traitée (Autobiographie d’un lecteur, éd. Fayard, 2000) : Est-il possible que l’on tombe amoureux d’une héroïne de fiction ? Il méditait les échanges en rentrant chez lui lorsqu’il s’aperçut soudain qu’il ne retrouvait pas le prénom de Madame de Rénal. Le supplice cérébral l’empêcha de s’abandonner à la sieste.
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« Toute la valeur de mon livre, s’il en a une, sera d’avoir su marcher droit sur un cheveu, suspendu entre le double abîme du lyrisme et du vulgaire. »
(Gustave Flaubert. Lettre à Louise Colet à propos de Madame Bovary, 20 mars 1852)
Samedi 24 septembre
Jeremy Corbyn est largement réélu à la tête du parti travailliste britannique. Le vieux Labour s’enfonce dans l’archaïsme. Seul un Brexit interne pourra l’en dégager.
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C’est signé ! Le message provient d’Inde. Il porte sur un contrat qui devrait susciter la création de 40 à 50.000 emplois pour la France. Énorme ! C’est formidable. Malheureusement, c’est l’industrie de guerre qui fera diminuer le chômage. Il s’agit d’une commande de 36 avions Rafale. Jusqu’à ce jour, cet avion était réputé invendable. Aucun des prédécesseurs de François Hollande n’était parvenu à en vendre un seul au point que la raillerie était doucement apparue… Pour une fois, Hollande ne la provoque pas, il la fait taire.
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« L’esprit supérieur qui, loin de railler, sait endurer la raillerie, se montrer indulgent aux imbéciles, ne pas s’irriter, ne jamais se venger, mais garder le calme fier d’une âme impassible. »
(Nicolas Gogol. Les Âmes mortes, 1842).
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Les tribulations d’une jeune et belle avocate talentueuse qui fréquente autant une voyante qu’un psychiatre, les états d’âme de mecs un peu bêtes, un peu salauds, très inconstants et veules… Il n’y a qu’une seule bonne raison d’aller voir Victoria, c’est de suivre la carrière de Virginie Efira qui promet d’être ascendante. Pour le reste, on attendra le prochain film de Justine Triet avec prudence et méfiance. Le temps perdu dans une salle noire culpabilise parfois le cinéphile, qui s’interroge sur son flair.
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En tondant sa pelouse, il se fabriquait un almanach Vermot. Que dit le contremaître-bûcheron norvégien à ses équipiers ? « Allons les gars, aux bouleaux ! » Que dit le contremaître bûcheron français à ses équipiers ? « Aux arbres, citoyens ! »
Dimanche 25 septembre
Dans la Cour des Invalides où, comme chaque année, une manifestation leur st consacrée, François Hollande reconnaît « la responsabilité des gouvernements français dans l’abandon des harkis » dès 1962. Et qu’on ne dise pas que cette déclaration est un revirement de circonstance inclus dans son plan tactique en vue d’une réélection. Primo, cette reconnaissance faisait partie de ses engagements de campagne ; secundo, les harkis votent traditionnellement à droite, en masse, et même à l’extrême droite. Cela dit, Le Figaro ayant choisi l’événement pour libeller sa question quotidienne dans le cadre de l’enquête auprès de ses lecteurs, affiche un résultat quasiment inédit puisque 65 % des réponses sont favorables au président de la République.
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« De Gaulle a abandonné les harkis : c’est son crime – et le nôtre. »
(Jean Daniel. Á qui de Gaulle a-t-il menti ?, in Le Nouvel Observateur, 17 septembre 2009)
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Le Confessioni, film de Roberto Andò, est une fable satirique sur les banquiers et les économistes. Les ministres des Finances du G8 se réunissent sous la présidence du Directeur du Fonds monétaire international dans un grand hôtel italien (le film a été tourné dans le Grand Hôtel de Fiuggi, ville du Latium). Un moine y a été invité. Discrètement et individuellement, il leur donnera non pas une leçon de vie mais une leçon de la vie. « Je ne crois pas à l’utilité du Mal »… Daniel Auteuil parfait dans le rôle du directeur du FMI ; de même Toni Servillo dans le rôle du moine. La photographie est magnifique, les gros plans très expressifs.
Lundi 26 septembre
Alep. On est fatigué de qualifier cette ville en ruines après les nouveaux bombardements meurtriers qu’elle subit. Les Russes, très présents sur le terrain, ne semblent toujours pas décidés à lâcher Bachar, oh que non ! Loin de là !« Et qui dit mort dit aussi le monde mystérieux auquel on accède par elle. Après tant de réflexions et d’expériences parfois condamnables, j’ignore encore ce qui se passe derrière cette tenture noire. Mais la nuit syrienne représente ma part consciente d’immortalité. »
(Marguerite Yourcenar. Mémoires d’Hadrien, éd. Gallimard, 1982)
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En Pologne, l’interruption volontaire de grossesse est redevenue totalement interdite. En Pologne, pays membre de l’Union européenne…
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De tous les présidents de la Ve République, seuls Charles de Gaulle et François Mitterrand s’étaient rendu à Calais durant leur mandat. François Hollande y est au