Sur l'air du "Temps des Cerises", au Parc Paul Trigalet

Paul Trigalet, tout le monde l'aimait. Il adorait se balader à vélo, portait une courte barbe, arborait un sourire aussi grand que son sens de l'humour et sa capacité d'indignation. Il luttait contre toutes les injustices au départ d'un éternel combat pour le droit au logement. Né en 1934, ce prêtre-ouvrier aux idées larges s'est éteint en 2018, après une existence vouée à la défense des personnes dont la voix ne porte pas loin. Les associations continuent son boulot de fond. "Solidarités Nouvelles" et "Comme chez nous", à Charleroi et ailleurs, poursuivent l'action entamée à la charnière des années 60-70 par le prêtre en salopette qui travailla dans la sidérurgie et l'aéronautique et fut délégué syndical FGTB. Qui  voyagea au Pays Noir et partout où les luttes le portaient. Trigalet se jouait de toutes les limites, aussi direct avec un habitant de la rue qu'avec un ministre.

Bernard Ide, dans son livre sur ce parcours, écrit:  "Paul Trigalet, un homme dont tant de rêves et de projets ont vu le jour. Humble, déterminé, enthousiaste (son mot préféré est "formidable"), imprévisible, frondeur, soucieux des autres, activiste, curieux, débrouillard, fonceur, blagueur, pourfendeur de préjugés, obstiné, têtu, créatif, serviable: les mots se bousculent pour cerner le véritable personnage qu'était Paul Trigalet". Et, cinq ans après sa disparition, Paul Trigalet aura réussi à rassembler, en cette fin d'août, sous un ciel lumineux, un sacré nombre de celles et ceux qui ont eu la chance de croiser sa trajectoire, pour inaugurer le parc dédié à un gars qui aimait les jardins. 

C'était à l'Allée Verte, à Jumet et tout a commencé par "Le Temps des Cerises" pour se terminer par "Lolotte". Deux chansons que Paul aimait parce qu'elles parlent de ce qui lui tenait à coeur. Parce qu'elles font passer de l'espoir et de la volonté dans l'atmosphère de ces kermesses où l'on refait parfois le monde. Ecoutant ces chansons, tous avons sans doute revu des moments vécus dans les parages de Paul.

Puiis, sous les immeubles et à l'orée du parc, des paroles d'hommage. Ainsi Sylvain, venu du Québec. Stagiaire de Paul aux débuts de Solidarités Nouvelles, l'apprentissage sur le terrain de la lutte pour l'accès au logement a changé sa vie. Quant au bourgmestre de Charleroi, il confie avoir rencontré Trigalet quand il était jeune. Il montrait un exemple. L'homme disait haut sa vérité. Paul Magnette d'observer que, face à la précarité, le secteur public (CPAS, Ville, Etat...), acteur de la solidarité dite "froide"; et l'associatif, acteur de la solidarité "chaude", (celle que prônait le prêtre-ouvrier) se doivent d'être solidaires, en toute indépendance. Du militant il se souvient qu'il ne parlait pas à la place de la personne confrontée à des difficultés. Il l'aidait à prendre la parole. Mais quand les gens n'étaient pas là il prenait la parole pour les défendre. Avec une énergie tenace.

On pensera à cette manière d'être, sous les arbres du Parc de l'Allée Verte, lors d'une balade, un jour. Faut aller voir. La cité compte 269 logements et donne sur un coin de campagne en ville, pas très loin du ravel où filent les vélos, dans ce Charleroi en constante évolution. C'est là que Trigalet a lancé le mouvement qui a conduit à la Fédération Nationale des Habitants de cités, lors d'une fête de quartier dont certains se souviennent.

Un premier pas, la route continue.  

( La version électronique du livre de Bernard Ide sur le parcours de Paul Trigalet est accessible sur le site web www.solidaritesnouvelles.org  )