Deux cœurs, deux symboles.
Le 14 septembre 2023
Récemment, dans ces colonnes[1], à grands traits, j’avais raconté une histoire de cœur.
En fait, deux histoires ; celle de l’invention de la forme de notre cœur contemporain et celle du symbole du cœur comme représentation de l’amour. Histoires différentes qui se sont conjuguées et dont nous avons oublié l’origine.
A la toute fin de mon billet, je faisais référence à une autre représentation du cœur dans les œuvres de street art. Une représentation tout bien considéré bizarre parce qu’hétéroclite.
Elle reprend certains traits du cœur symbole de l’amour : la forme désormais canonique, la couleur rouge. Elle s’en écarte radicalement en intégrant des éléments issus des planches d’anatomie médicale. Les artistes tout en gardant grosso modo la forme ovoïde orientée la pointe vers le bas, ajoute de gros « tuyaux » censés représenter les vaisseaux sanguins tels que l’aorte, la veine cave, les artères pulmonaires et les veines pulmonaires et le réseau dense des veines et artères qui transportent le sang dans les différentes parties du cœur.
Ne cherchons pas dans cet embrouillamini une représentation réaliste de notre organe. C’est un cœur de fantaisie et, également, un cœur-symbole.
Toute la question est de savoir quel est le symbole porté par ce cœur-organe.
La réponse est à chercher dans les environnements graphiques des cœurs-organes.
Dans la quasi-totalité des cas, le cœur-organe est associé à des scènes marquées par la souffrance et la douleur. Cette connotation est large. Cela va de la mélancolie, au drame de la mort de l’être aimé, à la séparation et à l’exil.
Le développement du cœur-organe n’a guère remplacé notre bon vieux cœur-amour ! Les deux représentations rendent compte de deux sentiments différents, l’amour heureux et amoureux, et l’amour malheureux. Deux faces d’une même médaille.
Notons que c’est l’apport d’éléments plus ou moins réalistes qui modifie et inverse la signification.
Le cœur symbole de l’amour a envahi, un temps, tout le champ sémantique du sentiment amoureux. Le temps passant, son acception s’est rétrécie et restreinte à l’expression d’un amour heureux. L’amour malheureux et tous les sentiments qui y sont associés n’avaient pas alors de symbole particulier marquant à la fois l’amour et le malheur. L’invention du cœur-organe est une réponse artistique à une absence de représentation.


Inti






