semaine 38

Une guerre ne se termine jamais bien

Edito par Jean Rebuffat

Hiroshima. L'inscription dit "Reste en paix et ne répète pas les mêmes erreurs". Photo libre de droits issue de Wikipédia.

Les récents infléchissements dans le conflit qui oppose la Russie de Poutine à l’Ukraine de Zelensky ont poussé, comme on le sait, le maître du Kremlin à décréter une mobilisation partielle qui a cependant toutes les apparences d’une potentielle mobilisation générale. Jusqu’ici, malgré les déboires inattendus et très loin de l’écrasement en quelques jours de l’Ukraine puis de l’affermissement des positions dans l’est et dans le sud-est du pays envahi, Poutine y avait renoncé. Les dictateurs savent bien que leur maintien au pouvoir passe par un soutien d’une partie importante, voire une majorité, de leurs sujets, et que ce soutien est labile, particulièrement quand la vie quotidienne des citoyens devient insupportable. L’histoire fourmille de ces soudains renversements, et notamment celle de l’URSS. Le président russe s’est donc engagé dans une seconde cavalerie et c’est très inquiétant car en pratiquant la fuite en avant, les interdits s’estompent, la rage s’amplifie et tout pousse à des décisions suicidaires comme le rappelle l’exemple de l’Allemagne nazie.

Il serait vraiment temps de négocier et aucune des deux parties n’y songe plus, s’en remettant à leur certitude de victoire militaire.

Par exemple, au lieu d’organiser des référendums insincères, ne serait-il pas imaginable de discuter d’un cessez-le-feu véritable, s’accompagnant d’un retrait volontaire de l’armée russe à l’exception de la Crimée et du Donbass et les choses étant calmées, dans quelques années, demander aux populations de ces territoires si elles veulent russes ou ukrainiennes ? Il est bien possible que cela retranche à l’Ukraine une partie de ses terres de 1954. Il est évident que d’une certaine façon, ce serait une prime à l’agresseur.

Mais jusqu’ici aucun des deux camps n’a vraiment essayé les accords de Minsk et plus l’illusion symétrique d’un triomphe militaire s’installe, moins la voix de la raison est écoutée, alors que les morts s’accumulent, que les destructions s’aggravent, que le péril nucléaire, civil ou guerrier, s’amplifie et qu’en définitive, le monde entier est concerné, puisque la situation actuelle recrée l’antagonisme Est-Ouest sous l’œil des puissances émergentes, dites non-alignées, qui ne manifestent pas une sympathie excessive à l’égard du monde occidental, trop sûr de lui, dominateur et donneur de leçons. Pire: depuis la crise de Cuba, voici soixante ans, il n’y a jamais eu situation plus critique dans cette rivalité qu’on imaginait dépassée…

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