Pourquoi une grève mondiale pour le climat

Zooms curieux

Par | Journaliste |
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Le 26 avril 1986 explosait la centrale nucléaire de Tchernobyl, contaminant 3,3 millions d'habitants dont 1,5 million d'enfants. .Photo © AP/Vladimir Repik.

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Pourquoi une grève, instrument de lutte traditionnellement brandi par les syndicats et, plus récemment, par les femmes ?

Parce qu’on ne peut pas lutter contre la dégradation climatique sans se battre pour la justice sociale et celle-ci commence par un travail décent. Car la situation climatique actuelle est le résultat de politiques néolibérales qui ne visent que le profit des entreprises et pas le salaire des travailleurs et certainement pas la justice sociale. Et encore mois la protection des ressources naturelles.

A présent, la philosophie de l’exploitation de la terre par l’homme qui en serait le maître et le propriétaire absolu est morte, en tout cas dans la tête des millions de jeunes et moins jeunes qui manifestent inlassablement, depuis des moins, pour le climat, notre avenir commun.

Encore faut-il définir quel avenir nous voulons.

 La nouvelle philosophie qui émerge est celle des « communs » illustrée par l’actuel rassemblement « Transition now » où se concocte une sortie de notre système d’exploitation dévastatrice des ressources humaines et naturelles au profit d’une transition écologique et solidaire. Il ne s’agit pas d’une transition basée uniquement sur un changement d’habitudes et de comportements individuels. Ce n’est pas aux citoyens de payer le prix d’un système devenu fondamentalement inégalitaire. Tous doivent se mobiliser pour changer le modèle de mal développement dominant. Voilà pourquoi l’action des syndicats belges est essentielle : ils appellent à une transition juste où la création d’emplois décents et de qualité se fait dans le cadre de politiques environnementales radicales et urgentes.

Il manque cependant le troisième acteur : le monde politique.

Il se montre très discret par rapport à ce formidable défi que représente la transition écologique et solidaire. Mais quand on sait que le groupe des libéraux au Parlement européen était financé - entre autres - par Bayer/Monsanto, nous pouvons craindre une forte réticence de certains groupes à envisager un changement de paradigme !

A nous de voter pour ceux qui veulent réellement le changement. Et qui appliqueront enfin les directives et règlements européens visant à sauver notre avenir sur cette terre et qui ne sont toujours pas concrétisés.

Une loi Climat belge

En attendant, des universitaires francophones et néerlandophones belges ont fait le travail des politiques en concoctant une « Loi Climat » à savoir les lignes politiques qui visent à « maximiser les synergies avec les politiques visant à promouvoir les dimensions sociale, économique et environnementale du développement durable ». La politique climatique doit être « socialement équitable, promouvoir la biodiversité, lutter contre la pauvreté et réduire les inégalités. » C‘est bien ce que demandent nos marcheurs et grévistes pour le climat !

Encore faut-il concrétiser cela dans notre pays aux compétences éclatées dans les diverses régions et communautés et face à certains partis politiques qui ne veulent plus rien de cohérent et de coordonné au niveau fédéral. Il y a déjà un tragique précédent : on se souvient du nuage de Tchernobyl dangereux pour les enfants en Flandre et pour les vaches (seulement en Wallonie ! )

Nos universitaires proposent donc une Conférence interministérielle Climat, une Agence interfédérale pour le climat, un Comité permanent indépendant d’experts pour le climat, une commission interparlementaire sur le Climat.

On pourrait ainsi se concerter dans toutes les langues et à tous les niveaux pour élaborer un « Plan national intégré Energie-Climat et stratégie à long terme » qui devrait être déposé tous les 10 ans (et le premier en décembre de cette année !) auprès de la Commission européenne. Il s’agirait en effet de vérifier la manière dont seraient appliquées en Belgique les « cinq dimensions de l’Union de l’énergie » : la sécurité de l’approvisionnement énergétique, le marché intérieur de l’énergie, l’efficacité énergétique, la décarboxylation, la recherche, l’innovation et la compétitivité…

Donc, nos universitaires préconisent un dialogue multiniveau sur le climat et l’énergie : grand public, autorités locales, organisations de la société civile, le monde des entreprises, les investisseurs, etc.

On verrait bien le Sénat abriter ce dialogue, plutôt que de le supprimer froidement. Qu’il reste une chambre de débats entre politiques et citoyens, un lieu de consultation populaire, de concertation sur des sujets délicats, d’expérimentations citoyennes. Pourquoi pas ?

En tout cas, le travail est prêt. Il est retoqué par le Conseil d’Etat qui considère qu’une loi spéciale ne peut empiéter sur les compétences de Communautés et des Régions. Pour ce faire, il faut soit une révision de la Constitution, et notamment l’article 7 b qui impose déjà à l’Etat fédéral aux Communautés et aux Régions de poursuivre « les objectifs d’un développement durable, dans ses dimensions sociales, économiques et environnementales, en tenant compte de la solidarité entre les générations. » Tout est bien dit. Il reste à rendre ces beaux principes contraignants dans une loi à majorité simple ou à majorité spéciale, indique le Conseil d’Etat. Ce qui est parfaitement possible et même rapidement sauf que certains ne veulent pas d’une révision de la Constitution et préconisent plutôt un accord de coopération entre Régions… La palabre politique fait rage alors que les millions de marcheurs et grévistes veulent des décisions concrètes et rapides.

Reste à espérer que le prochain gouvernement fédéral mette cela en œuvre.

Il y a urgence, surtout si on lit bien l’étude publiée dans le European Heart Journal le 12 mars : la pollution atmosphérique pourrait entraîner le double du nombre de décès en excès par an en Europe par rapport aux estimations précédentes, soit 790.000 décès supplémentaires dans l’ensemble de l’Europe en 2015. Il ne s’agit pas seulement de graves maladies respiratoires : la pollution atmosphérique provoque deux fois plus de décès dus aux maladies cardiovasculaires (crises cardiaques et accidents vasculaires cérébraux).

Mais il y a une autre urgence qui nous menace tous : l’actuelle course aux armements nucléaires annonce un péril encore plus terrifiant, sans qu’il y ait le moindre contrôle politique et citoyen sur cela. S’il n’y a pas un sursaut pacifiste de nos démocraties, l’hiver nucléaire précédera le désastre climatique !

https://www.lalibre.be/actu/international/tchernobyl30-ans-apres-en-flandre-on-rentrait-les-enfants-en-wallonie-on-rentrait-les-vaches-photos-571e1c5b35708ea2d4e1aa07

https://www.rtbf.be/info/belgique/detail_loiclimat-le-camp-des-partisans-plus-divise-que-jamais?id=10167287

« La pollution atmosphérique tue 800.000 Européens par an », Frédéric Soumois, Le Soir du 13 mars 2019.

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http://www.cnapd.be/communiquede-presse-2-3-des-europeens-veulent-se-debarrasser-des-armes-nucleaires-americaines-stationnees-en-europe/

 

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