Aveugle et sourd

C'est une petite info du genre de celles qui font au mieux quinze lignes dans les journaux mais elle est emblématique des dysfonctionnements de la démocratie dont on observe le malaise un peu partout en Europe, son berceau, tout de même, ne l'oublions pas. La Chambre fédérale a voté une résolution demandant que la Belgique prenne sa part dans les quotas de migrants que périodiquement, les sauvetages en mer fournissent à l'Union européenne. Comme les voisins français ou luxembourgeois le font systématiquement.

Une majorité on ose à peine dire progressiste, en tout cas sensible aux droits de l'homme et à la détresse des gens, exhorte donc le gouvernement fédéral minoritaire et en affaires courantes depuis presque un an et que fait le gouvernement fédéral? Le sourd et l'aveugle. Le sourd parce qu'il ne veut rien entendre et que par l'entremise de sa ministre Maggie De Block, laquelle se distingue décidément fort peu de son prédécesseur Theo Francken, il a fait savoir qu'il ne changerait pas un iota à sa politique actuelle. L'aveugle parce que malgré les dénégations naïves et autosatisfaites de la nouvelle Première ministre ff Sophie Wilmès, ce gouvernement ne voit pas qu'il est en train de porter des coups aux valeurs que soudain, l'Union européenne ne veut plus protéger, mais promouvoir. En vérité, on se demande bien quelle différence cela pourrait bien faire d'accueillir de temps à autre une poignée de naufragés. Rappelons que dans un pays de plus de 11 millions d'habitants, un millier de réfugiés, cela ne fait même pas la millième partie de la population, moins de 0,1%. Qu'on ne vienne pas resservir la vieille rengaine de l'appel d'air: ce n'est même pas une fenêtre qu'on entrouvre, ni même une lucarne ou un soupirail, c'est au mieux un vasistas aussi vite refermé que possible. On parle ici de quelques dizaines de personnes!

Mesdames et messieurs les parlementaires fédéraux, rédigez donc une loi et montrez que la démocratie, ce n'est pas l'obéissance à l'exécutif mais la prédominance du législatif sur celui-ci. Après tout, les députés ont été élus pour faire des lois, pas pour être des godillots. L'occasion est belle de régler des problèmes qu'on appelle en général questions éthiques sans se préoccuper des jeux partisans. Peut-être cela contribuerait-il restaurer un peu de confiance dans des institutions qui perdent de leur légitimité au fur et à mesure que leur impuissance, elle, gagne en évidence et à propos d'appel d'air, c'est en provoquer un fameux pour les populistes de tout crin.