Charlie blasphème

Poing de vue

Par | Journaliste |
le

La couverture du numéro spécial qui reprend les fameuses caricatures

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Tandis que s'ouvrait à Paris le procès périphérique de l'affaire, Charlie Hebdo, le journal meurtri, décidait de republier en une les caricatures de Mahomet qui avaient déchaîné la haine jusqu'au meurtre – voire, serait-on tenté d'écrire, jusqu'au génocide ou presque. Aussitôt les mêmes menaces surgissent: le totalitarisme religieux est loin d'être moribond, et dans nos pays ouest-européens où la majorité des gens ne croient plus ni à dieu ni à diable, on mesure probablement assez mal que l'îlot confortable dans lequel nous nous mouvons est à la fois récent et restreint.

Qu'importe: la Révolution française a aboli le blasphème. On peut comprendre qu'aux yeux ou aux oreilles des croyants, il ait de quoi choquer. Mais la liberté d'expression, ce n'est pas de l'eau tiède; elle doit permettre de troubler, d'interpeller, de protester, de polémiquer; elle doit autoriser la publication et la diffusion d'idées fortes et d'opinions nouvelles.

Bien sûr cette liberté, comme toutes les libertés, a des limites que fixe la loi – et que l'on peut critiquer. Idéalement, le respect d'autrui et une grande tolérance, qui n'est qu'une forme sublimée de la courtoisie, d'ailleurs. Ses excès sont punis par la loi: calomnie, diffamation, racisme, xénophobie, négationnisme, révisionnisme. Sur ces derniers points, l'extrême-droite la plus vive conteste, au nom de la liberté d'expression, qu'une loi puisse punir des Faurisson, des Soral ou des Dieudonné. C'est oublier qu'un fait n'est pas une valeur ou une opinion et qu'une thèse peut être un mensonge. Il n'y a qu'une seule race humaine, homo sapiens, et les chambres à gaz ont existé. D'ailleurs la loi n'impose pas de croire dans l'existence des chambres à gaz; elle interdit de nier les génocides. Elle n'empêche personne d'avoir en soi l'idée parfaitement stupide que la couleur de la peau a plus d'importance que celle des yeux; elle punit ceux qui prônent la haine de l'autre.

Fût-elle religieuse, nulle loi ne doit et ne peut imposer la croyance dans l'existence d'un dieu quel qu'il soit et déterminer que l'athéisme est un crime. Or c'est exactement ce que les fondamentalistes essaient. Au nom d'un respect qu'ils n'ont pas, ils veulent contrôler la pensée. Peine perdue: même si des victoires ponctuelles peuvent laisser penser le contraire, toute l'histoire de l'humanité prouve que c'est un espoir vain. Comme le disait si bien Cabu, prêtant ces mots à Mahomet: «c'est dur d'être aimé par des cons».

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