Jadis, cela rendait sourd

Poing de vue

Par | Journaliste |
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Paris, ville de débauche où les péchés véniels sont capitaux... Photo © Jean Rebuffat

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Il y a quelque chose qui coince dans la perception de la sexualité au niveau de la galaxie politico-médiatique. Ce n'est pas nouveau, certes, mais tout cela rejoint ce politiquement correct engluant dont les causes sont multiples mais les effets identiques : on a l'impression que c'est jusque par le trou de la serrure que désormais nous sommes surveillés et punis si on désobéit. Les déviances tolérées en des temps pourtant réputés plus austères tant qu'elles restaient discrètes sont aujourd’hui mortelles même quand elles ne contreviennent à aucune loi. D’ailleurs la répression s’élargit. Au risque de nager à contre-courant, je vais en prendre pour exemple le cas Polanski. Que ce cinéaste ait commis il y a 45 ans des actes condamnables est un fait. Mais faut-il pour autant accroître les délais de prescription au niveau de ceux relatifs aux crimes contre l’humanité ? La prescription, théoriquement, est aussi un droit que tant un certain sentiment d’équité qu’un sens pratique certain a fait aboutir dans nos codes pénaux. Voilà à présent que l’académie des Césars démissionne massivement parce que son film, qui dénonce tout de même un crime d’état, serait en réalité un masque destiné à cacher sous un vernis honorable qu’il se sent lui-même persécuté… C’est ridicule, il suffit d’aller voir le film (très académique, d’ailleurs) pour s’en rendre compte. 
Entendons-nous bien : les violences faites aux femmes sont rigoureusement inadmissibles, il ne s’agit pas ici de les minimiser. Mais aussitôt diffusée, cette info est supplantée par une autre, plus fraîche et plus croustillante : le candidat de la majorité présidentielle à la mairie de Paris a vu son ordinateur piraté et circulent des images et des textes où il drague une jeune femme qui n’est pas son épouse et où il se livre à quelque chose de bien banal aujourd’hui, faire l’amour à distance.
Ici aussi, pas de confusion : je n’éprouve aucune sympathie pour Benjamin Griveaux. Au contraire, le personnage est exaspérant, hautain, arrogant, déplaisant, tout ce qu’on voudra. Mais il a droit à une vie privée et celle-ci ne nous regarde pas. Elle ne concerne que sa sphère personnelle. En quoi cela pourrait-il influencer sa capacité à diriger une grande ville ? Or il y a aussitôt renoncé.
Faut-il être un puritain irréprochable pour briguer un mandat public ? Le code est strict mais sa base s’est élargie. On peut être homo et maire de Paris, ou Premier ministre en Belgique ou au Luxembourg. Mais il faut ensuite suivre les canons de la morale victorienne. Le rigorisme concernait déjà le menu de la présidence de l’Assemblée nationale. L’enfer que les bons pères promettaient aux jeunes gens coupables de se donner du plaisir est désormais une réalité immédiate. 
 

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