Le ramadan n'est pas un folklore anodin

Poing de vue

Par | Journaliste |
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Il faudra attendre le coucher du soleil. Photo © J. Rebuffat

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Il y a quelque chose de normal et de sympathique, bien évidemment, à respecter les coutumes des autres. Les non-musulmans regardent le ramadan avec ces yeux-là, évoquant avec une sorte d'envie les repas conviviaux à la nuit tombée. Certes, cela est vrai (1) et un peu d'ascèse, dans nos sociétés de bien nourris, ne fait de tort à personne. Mais le ramadan, c'est-à-dire le jeûne que s'imposent les adeptes de l'islam du lever au coucher du soleil, mérite une analyse un peu plus fouillée que le sourire approbateur devant un folklore anodin.

D'abord, est-on sûr que l'expression «chacun fait ce qu'il veut» est vraie en l'occurrence? Il y a un contrôle social extrêmement contraignant qui précisément, entame cette liberté individuelle. C'est le même qui pousse les filles à se voiler même quand elles n'en ont pas envie: pour qu'on leur fiche la paix. En contrepartie, il faut concéder qu'une communauté facilement ostracisée (ou qui s'imagine telle, peu importe, et ceci vaut pour d'autres religions) a tendance à manifester les signes les plus ostentatoires de sa croyance. Car le paradoxe, c'est que la plupart des musulmans, dans les pays occidentaux, sont en réalité peu pratiquants, notamment au niveau de ce pilier qu'est la prière. Or, à lire certains théologiens ou spécialistes de l'islam, dont certains sont musulmans, le ramadan, si bien observé, n'est pas à suivre avec le même zèle, alors que d'évidence, il est très respecté... même si des stratégies d'évitement sont observées, soit dans l'intimité strictement familiale, soit en se déclarant malade, par exemple. Il est tellement obligatoire que les pré-adolescents et même des enfants le suivent... parfois à l'insu de leurs parents.

Encore une fois, on peut comprendre le principe de l'ascèse. Les catholiques ont leurs carême et jours maigres. Se rappeler que tout le monde n'a pas à manger, qu'il faut avoir le sens du partage et de l'effort est en soi positif. Le problème, c'est qu'ici il est tout bonnement dangereux pour la santé. On objectera que des exceptions sont prévues mais le zèle ambiant empêche leur véritable application. Quand le ramadan, mois lunaire, tombe durant les jours les plus longs de l'année, c'est un véritable calvaire qui s'aggrave au fur et à mesure que l'on va vers le nord. L'interdiction de boire même de l'eau est particulièrement désastreuse même pour quelqu'un.e dans la force de l'âge.

Ne voit-on pas que le masochisme pousse à la soumission mentale? Ce rigorisme religieux abrutissant voire cruel n'est pas l'apanage de l'islam. On a connu des flagellations, des processions à genoux, des scarifications et d'autres horreurs même dans d'autres religions ou croyances que celles dites du livre. Quel que soit le système mental qui dirige l'homme, s'il pousse à l'excès et s'il veut ignorer les accommodements raisonnables qui ne sont pas forcément des compromissions, il porte en lui sa propre condamnation: il pousse à la révolte ou à l'indifférence. Et au désir de laisser à chacun, en effet, de décider ce qui est bon pour lui en fonction des critères qu'il aura librement choisis. Pour paraphraser une formule bateau, trop de religion tue la religion.

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(1) J'y ai déjà participé, et aimé, comme il m'est arrivé d'apprécier l'ambiance du shabbat ou un sermon pastoral à la mort d'un de mes proches.

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