Europe, miroir de nos incohérences

Zooms curieux

Par | Journaliste |
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Au centre, Federica Mogherini, à sa gauche Barbara Pesce Montano, directrice des Nations Unies à Bruxelles, à sa droite l’artiste Cristobal Gabarron. Photos © Jean-Frédéric Hanssens

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Une superbe boule scintillante trône au Rond-point Schuman, sous les fenêtres de Federica Mogherini, Haute représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, aussi vice-présidente de la Commission européenne. Elle est entourée d’une spirale très colorée, 70 figures symbolisant la diversité de notre espèce humaine en ronde joyeuse. Toutes images de notre humanité rebondissant sur les miroirs en facette de cet « Univers de lumière », créé par l’artiste espagnol Cristobal Gabarron.  

Ce 25 octobre, au lendemain du jour de Nations Unies, 70 ans après la Déclaration universelle des droits de l’Homme qui en est la philosophie et l’espoir des nations, cette œuvre d’art reflète aussi toutes les contradictions de la politique européenne actuelle.

Cette chaîne enlacée symbolise, pour Federica Mogherini, la coopération entre les humains plutôt que la compétition. Mais la Commission européenne qui pèse de tout son poids sur ce Rond-point Schuman n’arrête pas d’encourager le système le plus inégalitaire, le plus porté à la compétition à outrance qu’est le mal nommé « libre échange ». On le décrirait mieux par ces termes : néo-libéralisme mondialisé, favorisant des multinationales prédatrices au détriment d’échanges commerciaux respectueux des droits des populations qui produisent les biens, les services, la culture, qui protègent la nature et assurent l’avenir de notre monde. La Commission européenne, elle, refuse de négocier à Genève, dans le temple des droits humains, un projet de traité contraignant pour ces multinationales qui accaparent toute la richesse du monde et volent les Etats et donc les peuples en ne redistribuant pas cette richesse par le biais de salaires décents, d’impôts justes, de réparations des dommage graves faits à l’environnement.

Federica Mogherini assure que l’Europe entend réaliser les objectifs des Nations Unies de paix et de développement. Ce même jour, débute en Norvège un vaste exercice militaire de l’OTAN, aux frontières avec la Russie. 50.000 militaires dont 14.000 Américains, 65 navires de guerre, 250 avions et hélicoptères, 10.000 véhicules… Au moment où les Etats-Unis rompent le traité américano-soviétique sur les armes nucléaires à longue portée et où le président Trump annonce la fabrication d’armes atomiques « de faible puissance ». Au moment où le gouvernement belge décide d’acheter pour 15 milliards d’euros de très coûteux avions de chasse américains qui peuvent transporter des bombes nucléaires… Ce dont personne, parmi la population, ne veut. Au moment où l’Europe bredouille son intention de créer une armée européenne équipée de matériel de fabrication européenne. Cherchez la cohérence ?

L’Europe symbole de paix et de coexistence pacifique entre nations ? Les Etats européens se disputent les faveurs des pires dictatures comme celle de l’Arabie saoudite qui écrase le Yémen et affame sa population, par rage contre le concurrent iranien sur les marchés du pétrole et de la foi ! Cette même Europe qui se tait devant l’instauration d’un apartheid criminel au vu du droit international, instauré en toute impunité par le gouvernement israélien qui assassine des civils palestiniens dont le seul tort est de se rebeller contre une occupation sans cesse condamnée par les Nations Unies. Malgré cela, Israël reste un partenaire privilégié de l’Union européenne.

Cette même Europe qui externalise ses frontières pour se défendre de l’arrivée de réfugiés fuyant les fureurs guerrières auxquelles, parfois, des Etats européens ont participé. Et ces milliers d’autres migrants qui fuient la misère induite par le système économique inégalitaire et par le pillage des ressources de leurs pays.

Je vois cette œuvre d’art depuis mon bureau, sourit Federica Mogherini. Elle éclaire le Rond-point et tranche avec le gris de la ville de Bruxelles, souligne-t-elle.

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Nous dirions plutôt qu’elle contraste avec la grisaille de la diplomatie européenne, virant souvent au noir sous la pression de forces brunes qui s’emparent de plusieurs pays européens.

Si la Région bruxelloise le décidait, cet « Univers de lumière » resterait là, plus qu’un mois seulement, afin d’illuminer nos dirigeants quels qu’ils soient.

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