L’Europe, progressiste ou progressant ?

Les calepins

Par | Penseur libre |
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L’Europe attend le vote des jeunes. Photo © EC audiovisuel service

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Lecture 30 min.

Mercredi 1er mai

 L’un des événements les plus relatés hier est l’abdication de l’empereur du Japon Akihito en faveur du prince héritier Naruhito. Qu’est-ce que cela va changer dans la marche du monde ? Strictement rien. Et dans celle du Japon ? Strictement rien.

                                                                       

 Comme la mariée de François Truffaut, aujourd’hui, les Gilets jaunes étaient en noir.

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  Á Paris, un grand rassemblement d’experts se penchent sur l’épineuse question de la biodiversité. Ils comparent la présente période de disparition des espèces à celle de l’extinction des dinosaures, il y a 60 millions d’années. Brr ! Comme le Temps se rétrécit tout à coup ! D’autre part, des scientifiques annoncent que des cellules congelées peuvent faire renaître des espèces disparues. Embarrassés, ils ajoutent que le clonage d’embryons n’est pas une solution sage pour la santé de la planète. Mais ce qui est dit est dit, d’une manière ou d’une autre. Est-ce que la pensée est biodégradable ? Le professeur Tournesol est soudain pris de vertiges.

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 Un sondage de l’’IFOP révèle que 9 % des Français croient que la Terre est plate. Aux États-Unis, ils seraient 12 millions. Les rêveries du penseur solitaire ont la vie dure. « Cette histoire est entièrement vraie puisque je l’ai inventée » disait Boris Vian.

Jeudi 2 mai

 « On a évité le pire ». Tel est le constat de Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur, que Régis Debray invite à méditer cette pensée de Paul Valéry : « la faiblesse de la force est de ne croire qu’en la force. » Telles sont aussi les conclusions des médias consécutivement aux analyses des manifestations d’hier. De Montparnasse à la Place d’Italie, on ne vit que des personnes toutes de noir vêtues, casquées, masquées, qui s’affrontaient à coups d’armes de dissuasion et d’armes de fortune. D’un côté un bon millier de casseurs venus pour détruire tout ce qu’ils pouvaient démolir, de l’autre 7400 policiers devant les empêcher de nuire. Et tout au long du champ de bataille, des passants apeurés ainsi que des commerçants barricadés. « On a évité le pire ». Des hommes et des femmes se tenant par le bras, défilant sous le soleil tout sourire, rose rouge et muguet à la boutonnière, chantant la camaraderie et célébrant la fraternité dans les boulevards de Paris, panneaux et calicots pour exprimer le besoin d’égalité comme celui de justice sociale. Tels étaient les cortèges d’antan que la Fête du Travail reflétait. « On a évité le pire ». C’était quoi le pire ? Des morts ? Comme ceux qui, ouvriers de Chicago réclamant la journée des huit heures le 1er mai 1884 furent condamnés à mort et dont le sacrifice donna naissance à un jour férié ? Un des rares jours du calendrier à ne pas être lié à la religion ? Comme les mineurs de Fourmies sur qui la troupe tira, le 1er mai 1891, parce qu’ils réclamaient un meilleur statut que l’épuisement permanent et le décès prématuré par étouffement de silicose ? La liste pourrait être longue. Tous les drames étaient liés à des revendications objectives et légitimes qui firent avancer la dignité humaine. Les colères de 1er-mai étaient jadis fertiles en conquêtes sociales. Celle d’hier n’était que nihiliste. Honteuse, indigne de la portée du jour. La Fête des Travailleurs, c’est la Pâque des opprimés. Les images du 1er-mai parisien ne débouchent sur rien d’autre qu’une grande tristesse.

Vendredi 3 mai

 Lorsque dans « Le Schpountz » (Marcel Pagnol, 1938) Fernand Charpin, l’oncle, dit à Fernandel, son commis-épicier : « Tu n’es pas bon à rien, tu es mauvais en tout », on serait tenté d’appliquer cette savoureuse expression à quelques personnalités qui occupent les actualités. Et surgit immédiatement le nom de Donald Trump. Eh bien on se tromperait. Le quotidien allemand Die Welt prétend que Donald Trump est, de tous les présidents étatsuniens, le meilleur joueur de golf.

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 Theresa May vient de congédier son ministre de la Défense. C’est le 47e démissionnaire, démissionné ou viré depuis la constitution de son gouvernement qu’elle voulait, en campagne, « strong and stable ». Be May. Maybe… Mais elle, elle est toujours là… Et grâce au rabiot de l’Union européenne, elle devrait passer l’été… Après, we will have to wait ans see.

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 On a peine à le croire mais c’est Le Monde qui révèle l’information. L’Indonésie est une grande démocratie de 196 millions d’électeurs répartis sur 8000 îles. On a voté là-bas le 17 avril. Une présidentielle courue d’avance et des législatives régionales. 245.000 candidats pour environ 20.000 postes. La loi exige que les résultats soient publiés le 22 mai. On ne connaît pas le vote électronique. Le dépouillement constitue donc une tâche immense. Au début de ce mois, 377 membres de la commission électorale chargés du dépouillement étaient morts d’épuisement et 2912 hospitalisés pour la même cause. Aux futurs conférenciers chargés de démontrer que la démocratie a un prix, voici un exemple incomparable. L’Indonésie est aussi le premier pays musulman de monde. Prions Allah qu’aucun candidat n’exige un recomptage des bulletins ! 

Samedi 4 mai

 La Floride est le 15e État américain à autoriser les enseignants à porter une arme. L’autorisation a du reste plutôt l’allure d’une obligation, même si 70 % des personnes concernées sont opposées à cette mesure. Donald Trump a invité tous les gouverneurs à légiférer en ce sens. On voyait beaucoup de voyous dans les westerns, mais il était rare que l’école ne soit pas épargnée. Le lieu de diffusion des savoirs, sous tous les régimes, est sanctuaire. Ce n’est plus le cas aux États-Unis de Trump. Cette brute épaisse n’est pas un accident de l’histoire. Il ne faut pas oublier qu’avant d’affronter Hillary Clinton, il avait éliminé une douzaine de prétendants républicains de haut niveau, de belle situation et d’expérience vérifiée. Á un an des primaires, l’on serait imprudent de croire que ce pays sera débarrassé de Trump. Il est l’expression de l’Américain moyen, de l’Amérique profonde, et du reste, quand son image se ternit, il s’en va se resourcer en un meeting où il sait que ses partisans lui remonteront le moral. Et ils sont là, toujours là, comme au premier jour, pour le regonfler, lui redonner le punch du cow-boy. Ils seront encore là lorsqu’il s’agira de voter pour lui. Sauf si d’ici là, il commettait une énorme bourde. Mais pour la paix du monde, peut-être vaut-il mieux ne pas le souhaiter.

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 Afin de favoriser les piétons dans les grandes villes, les écologistes allemands ont instauré une réforme au code de la route : le feu vert pour piétons dure plus longtemps que le feu vert pour les automobilistes. Ce qui revient à dire que la durée du feu rouge pour automobilistes est plus longue que celle du feu rouge pour piétons. Astucieux. Surtout pour augmenter les embouteillages. Ne serait-il pas plus net et plus audacieux d’envisager la fin de l’usage de l’automobile dans les grands centres urbains ?

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 Du sport à la gastronomie en passant par la politique et, bien entendu, par la littérature et l’art, il est souvent périlleux d’être l’enfant d’une vedette. La notoriété est en ces cas plutôt un handicap qu’un avantage. Ainsi, tant que Nils Tavernier ne réalise pas un chef-d’œuvre – ce qu’on lui souhaite et que l’on peut lui prédire -, chaque fois qu’il proposera un long métrage, on aura toujours tendance à se demander comment son père, Bertrand, aurait traité le sujet. C’est le réflexe que provoque « L’incroyable histoire du Facteur Cheval ». Certes, retransmettre en image des états d’âme, une vision, une possession quasiment mystique est gageure. Mais ici, le film manque d’épaisseur et en faisant constamment émerger le tragique, il verse parfois dans le mélo. C’est dommage, d’autant plus que l’œuvre du héros, le Palais idéal d’Hauterives, passe trop au second plan dans l’histoire. Il n’y a pas de joie créative, pas de méditation fertile (le palais regorge de citations ou d’aphorismes trop peu mis en évidence) et pas de symphonie que pourtant la communion de l’homme avec la Nature a dû maintes fois déclencher. Bref, le film est honnête mais un peu plat. L’interprétation de Jacques Gamblin et celle de Laetitia Casta sont admirables. On regrettera encore que les surréalistes qui ont, André Breton le premier, - plus qu’un touriste américain ou un journaliste milanais - contribué à la célébrité post mortem de Joseph Ferdinand Cheval, ne figurent même pas au générique de fin.

Dimanche 5 mai

 Les Tories, le parti de Theresa May, viennent de perdre un quart de leurs mandats locaux. Les élections municipales ne furent pas une défaite mais bien une déroute. Tout semble indiquer que si rien n’évolue d’ici le 23 mai, les élections européennes saugrenues dégageront pareil résultat. L’alternative Moi ou le Brexit est devenue Moi et le Brexit.

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 La raison majeure de l’ascension d’Adolf Hitler ? La volkswagen. La raison majeure pour laquelle Donald Trump part favori pour sa réélection ? L’économie des États-Unis a recouvré le plein emploi.

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 En France 33 listes sont sur la ligne de départ pour concourir aux européennes. Toutes ne devraient pas être validées mais le nombre pléthorique est néanmoins le signe d’un symptôme. Symptôme français ? En Allemagne, il y en a 41 ! …

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 La bande-annonce du dernier film des frères Dardenne (« Le jeune Ahmed ») commence à être diffusée dans les salles noires et l’on y perçoit déjà une puissance se dégageant de la vie ordinaire, la force d’un témoignage de faits entrés tellement dans le quotidien qu’ils ne choquent plus, qu’ils n’émeuvent plus, sauf si les Dardenne les jettent au regard. Le film est sélectionné pour Cannes et il est prévu en salles à partir du 22 mai. Plus que dix-sept fois dormir. 

Lundi 7 mai

 Blanche Gardin est une humoriste caustique, à la fois très drôle et très triste, comme les meilleurs clowns. Elle a découvert que l’anagramme de carpe diem est : ça déprime. Elle a trouvé sa devise.

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 Fallait-il que ces gens soient obnubilés par l’idée de quitter l’étouffante RDA pour en arriver à coudre des morceaux de tissus afin de se fabriquer une montgolfière et de prendre le risque de s’envoler en famille vers l’inconnu, franchir le Rideau de fer et se retrouver à l’Ouest, synonyme de liberté ! Il est étonnant qu’un pareil exploit qui ridiculisa l’Allemagne de l’Est en 1979 n’ait pas fait l’objet d’un film en Occident. Sans doute est-ce le fait que le Mur de Berlin tomba dix ans plus tard et que d’autres histoires dans l’Histoire effacèrent l’aventure autant fabuleuse qu’audacieuse. C’est donc un Allemand, Miichael Herbig, qui s’en chargea, rendant bien l’atmosphère de prudence, de crainte, de peur dominée par l’obsession de fuir un régime tyrannique (« Le vent de la liberté »). Évidemment, lorsque l’on médite sur ce que l’on vient de savourer, la question élémentaire survient : que sont-ils devenus ? Et aussi : l’Ouest qu’ils espéraient et qu’ils s’imaginaient, était-ce bien celui-là ? Le manque de liberté devenait tellement oppressant que de toutes façons, ils ne pouvaient qu’être plus heureux de l’autre côté.

 Mardi 7 mai

 Erdogan, qui fut maire d’Istanbul, ne peut pas comprendre que son parti a perdu les élections municipales dans cette ville d’empire. Il y a certainement eu des erreurs – ou des fautes – dans le dépouillement. Il le dit, il le clame, il en est sûr. Alors il fait pression sur la Commission électorale afin qu’elle annule le scrutin et convoque de nouvelles élections. Le sultan est satisfait. En route vers le solstice. Mais si les électeurs, choqués par cette méthode autoritaire, renforcent le score du social-démocrate Ekrem Imamoglu, l’été risque d’être assommant pour Erdogan. L’Union européenne a demandé de pouvoir envoyer des superviseurs. Rendez-vous le 23 juin. D’ici là, les promesses et les menus cadeaux vont fleurir autour de Sainte-Sophie.

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 « Si Dieu existait, serait-il fier d’être catholique ? » Voici une question pertinente de Jean-François Kahn que l’on peut encore un tantinet décliner vers d’autres croyances où le doute est moins admis.

Mercredi 8 mai

 Le 13 novembre 2015 surviennent les terribles attentats du Bataclan à Paris. Trois jours plus tard, le président de la République François Hollande propose au Parlement réuni en Congrès Versailles une mesure de déchéance de la nationalité française pour les terroristes binationaux nés Français. Il est ovationné par une assemblée debout, unanime. Á mesure que les textes s’élaborent, naissent des objections ; et le 30 mars, Hollande est contraint de retirer son projet. Aujourd’hui, un débat est en cours à propos du retour éventuel de Français qui sont allés faire le djihad et qui souhaitent rentrer au pays, après l’écrasement de Daesh. Ce sont des traîtres à la patrie mais ils ont la nationalité. Que faire ? Leur ôter la nationalité française ? L’idée commence à germer dans certains échanges. Il y a les femmes aussi, qu’ils ont emmenées. Et puis les enfants nés de leur union sur les lieux des combats. Loin du microcosme, toujours en séances de dédicace dans des librairies ou en conférences dans les milieux scolaires, François Hollande est ça et là sollicité pour émettre un avis. L’homme reste muet sur la question mais on est sûr qu’il n’en pense pas moins. Il s’est toutefois prononcé en faveur du retour des enfants, innocents, au motif que l’on ne choisit pas ses parents et que l’on n’est pas coupable de leurs exactions. La composition du Parlement a considérablement évolué en trois ans et demi, mais les heures qui suivirent la tragédie du Bataclan sont encore vives dans toutes les mémoires. Et, on l’espère, dans toutes les rédactions.

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 Avec leurs amis Gilets jaunes, ils avaient, en mars, mis le feu au Fouquet’s et pillé la salle de restaurant. Fiers de leur mise à sac, ils avaient photographié leur butin (quelques couverts) qu’ils avaient arboré sur des réseaux dits « sociaux » alimentés par Internet. Ils comparaissent ce matin au Palais de Justice de Paris. Le Code possède un vocabulaire précis pour qualifier ces gestes-là. Le langage de la vie courante en détient aussi toute une panoplie. 

Jeudi 9 mai

 En cette Journée de l’Europe marquant le souvenir de la Déclaration Schuman, les symptômes donnent le vague à l’âme. On renouvellera le Parlement dans moins de vingt jours et l’extrême droite y gonflera sûrement ses effectifs. Si on y ajoute d’autres formations eurosceptiques, on obtient des promesses de sabotage de l’intérieur. Le président de la Commission Jean-Claude Juncker a présenté son bilan. Il en a profité pour annoncer que cette législature pourrait être la dernière, prévoyant que l’Union européenne se disloquera si elle ne se renforce pas. Qu’on ne ricane pas : le très europhile Guy Verhofstadt pense la même chose.  Macron et Merkel ne s’entendraient plus très bien. Sans un couple franco-allemand, il n’y a pas d’Europe active et robuste. Si elle n’est pas progressiste, qu’elle soit au moins progressant … Plus le temps passe et plus il semble que les Britanniques vont aussi participer aux élections. Ce serait le 23 mai. Élire des députés UK pour combien de temps ? Grotesque. Theresa May est dans une déroute sans fin, certes. Il faudra pourtant que cela finisse.

Vendredi 10 mai

(écrire « 10 mai » pour un homme de gauche, c’est penser 1981)

 Dans la vague qui l’emportait vers la charge suprême, il fallait qu’Emmanuel Macron rassemble des femmes et des hommes disposés à travailler à ses côtés. Il le fit, recrutant sur curriculum-vitae comme pour une entreprise. Beaucoup de députés sans expérience furent dès lors amenés à siéger à l’Assemblée. On découvrait aussi beaucoup d’amateurs au sein du gouvernement où, heureusement, se comptaient quelques chevronnés. La même inexpérience de l’action politique est apparue dans la constitution de la liste LREM pour les européennes. Celle qui emmène la liste, Nicole Loiseau, possède sûrement une parfaite connaissance des dossiers européens mais elle ne sait pas ce que c’est qu’une campagne électorale et elle n’a aucun charisme. Résultat : tous les sondages donnent la liste macronienne au coude-à-coude avec la liste lepeniste. Si celle-ci arrivait devant, cela se traduirait par un sérieux camouflet pour le président. Alors il descend dans l’arène au lieu de rester au-dessus de la mêlée, si bien que la dernière quinzaine de campagne va se résumer à une compétition entre les listes LREM et RN. « On refait le match ! » titrent déjà certains médias. Quel que soient les résultats, on peut déjà considérer que le vainqueur est Marine Le Pen. Elle a obligé Macron à s’engager personnellement et elle a consolidé sa position de principale prétendante. Car sa première victoire, ce fut de donner son nom à la liste sans s’y trouver ! Ce n’est pas la liste du Rassemblement national ni la liste de Jordan Bardella qui la conduit, c’est la liste de Marine Le Pen. De la belle ouvrage. L’ascension continue, tout le monde y assiste en le déplorant.

Samedi 11 mai

 Renverser Maduro ? Les informations que l’on reçoit en Occident donnent l’impression que tous les Vénézuéliens le souhaitent. L’Union européenne aussi mais son vœu ne sert à rien. Celui des États-Unis ne paraît point, pour l’heure, plus réalisable. On n’est plus au temps où, comme en 1973 au Chili, la CIA pouvait fomenter un putsch sans avoir l’air d’y toucher. Si cela ne tenait qu’à John Bolton, le néo-conservateur conseiller la sécurité nationale à la Maison-Blanche, les boys auraient déjà fait le ménage. D’autant plus qu’ici, contrairement à Santiago, il ne s’agit pas de virer un démocrate pour installer un général sanguinaire mais bien éliminer une brute épaisse pour le remplacer par un jeune et beau garçon, parfaitement serviteur et servile du capitalisme débridé. Mais au Venezuela, comme en Iran, il y a du pétrole, beaucoup de pétrole. Dès lors, la Chine et la Russie ne sont pas disposées à laisser le gendarme étatsunien user de sa matraque. Ni à Caracas, ni à Téhéran. Pas sûr que le borné Bolton soit capable de comprendre. Le taré Trump si. Pour l’instant.

                                                                        *

 Sensibilisés par les réseaux sociaux, les Gilets jaunes ont compris la stratégie. Macron s’implique personnellement dans le scrutin européen afin de battre le Rassemblement national. Donc, s’il n’y parvient pas, il devra en tirer les conclusions… Et donc, votons Rassemblement national ! La consigne est donnée dans les artères parisiennes et surtout sur le pavé nantais où le principal rassemblement des Gilets jeunes avait été programmé. L’Histoire ne repasse pas les plats, mais parfois, elle tousse.

Dimanche 12 mai

  Deux citations extraites du Journal du Dimanche au petit déjeuner à méditer pendant les calmes heures dominicales.

1. De Bernard Pivot : « Il y a un paradis sur Terre, c’est la littérature. »

2. De Pedro Almodóvar : « Je suis persuadé qu’une comédie intitulée « Hommes au bord de la crise de nerf » serait bien plus ennuyeuse que sa version féminine.

*

 Il y a l’imbécile qui regarde le doigt quand celui-ci montre la Lune. Il y a l’imbécile qui aperçoit une crotte de chien sur le trottoir et qui anticipe déjà son étonnement navré quand il l’aura piétinée. Il y a de plus en plus d’économistes qui prédisent l’arrivée d’une crise financière considérable et tout le monde les entend, considère leurs propos avec intérêt sans opter pour le principe de précaution. Qui dira que les économistes sont des imbéciles ?

Lundi 13 mai

 Tel-Aviv on fire. Il est toujours un peu émouvant de constater que des gens réalisent une comédie pour exorciser leur misère. Sameh Zoabi est parvenu à capter les tensions israélo-palestiniennes comme cadre de sa comédie. Un apprenti scénariste palestinien (Kais Nashef, délicieusement candide et poète) habitant à Jérusalem franchit le check point le matin et le soir afin de participer au tournage d’un film imaginé par son oncle à Ramallah. Deux peuples qui cohabitent et qui s’interpénètrent dans la méfiance et la crainte. Il en naît sûrement de la haine mais elle est en calque. C’est une comédie. Elle s’achève en farce, sans doute qu’un happy end aurait été ridicule.

                                                                        *

 Alain Rey aura 91 ans le 30 août. C’est encore lui qui a supervisé l’édition 2020 du Petit Robert. Comme celle du Petit Larousse, révélée le mois dernier, elle accueille pas mal de néologismes et de nombreux mots issus de la francophonie. C’est devenu un impératif : la France est la mère-patrie de la Francophonie mais les membres de cette grande famille tiennent à leurs spécificités. Une langue plurielle n’est pas une tare, pour autant que le creuset reste commun.

Mardi 14 mai

 La mise sous pression de l’Iran par les États-Unis commence à prendre une tournure inquiétante. Ce fou de Trump saura- t-il arrêter ses menaces en temps de sagesse ou dépassera-t-il le point de non-retour ? L’Europe se pose la question, contrainte une fois encore de rester au balcon dans la perspective de subir.

                                                                        *

 Le va-tout de Theresa May aurait un marchepied : ce seraient les élections européennes. Celle-ci auront bien lieu au Royaume-Uni le 23, mais les élus seront-ils installés début juillet ?  La Première ministre, qui est restée muette et discrète depuis quelques semaines, annonce un vote au Parlement pour juin. Elle entretient le mystère en ne précisant pas l’objet du scrutin mais la campagne est suspendue à cette échéance, inévitablement. May n’a plus grand-chose à perdre, fors l’honneur bien sûr… Au pays du nonsense, on sait surprendre cool…

                                                                        *

 Le Festival de Cannes a pris son envol. Un journaliste de la RTBF est parvenu ce matin à évoquer la création du plus grand festival de cinéma du monde sans citer Jean Zay, le ministre des Beaux-Arts du Front populaire qui le créa en 1938, dont le Festival sut plus d’une fois saluer sa mémoire, et que François Hollande fit entrer au Panthéon le 24 mai 2015. Sur la scène du Palais, Angèle a chanté « Sans toi », en hommage à Michel Legrand et Agnès Varda, Edouard Baer a réalisé quelques belles improvisations, et dans les couloirs et les coulisses, une pétition a été lancée contre l’initiative de remettre une palme d’or d’honneur à Alain Delon. On peut donc espérer capter un bon coup de gueule de la part du bel octogénaire en fin de semaine. Et surtout, à présent, on va pouvoir commencer à parler des films… Et le journaliste de la RTBF ? Puisqu’il a oublié le nom de Jean Zay, on va oublier le sien avant même de le citer.

Mercredi 15 mai

 Malgré le Brexit, le nombre d’Européens travaillant au Royaume-Uni est encore en augmentation. 4 % depuis le début de l’année, portant le chiffre global à 2,37 millions. Ce sont cette fois surtout les Bulgares et les Roumains qui contribuent à amplifier le nonsense.

                                                                        *

 Eric Dupont-Moretti a décidé de défendre les époux Balkany dont Isabelle, toujours hospitalisée  la suite de sa tentative de suicide du 1er mai n’assiste pas aux premières audiences, et pour cause. Il usera beaucoup de la procédure. Un autre point méritera l’observation régulière : l’entente avec son client résistera-t-elle aux humeurs de ce dernier ? Six semaines avec le maire de Levallois, quelqu’un d’autre qu’Isabelle peut-il le supporter ?

                                                                        *

 Le Sénat de l’Alabama vote l’interdiction totale de l’avortement. Même pour les cas de viols avérés, même pour les incestes. Un médecin qui pratiquera un avortement dans cet État américain risquera de 10 à 99 ans de prison. Le fait ne serait que secondaire si, grâce à d’autres États qui additionneraient leur requête, pareille révision finissait par aboutir à la Cour suprême. La vague conservatrice est peut-être un tsunami. 

 

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