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Par | Penseur libre |
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Photo © Paul Hermant

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Ce 30 septembre, vers 7h40, Théo Franken, Secrétaire d'Etat à l'immigration (NVA), s'exprime sur l'antenne de la VRT. Il déclare que les personnes expulsées par l'office des étrangers sont tous de grands criminels. Face à lui aucun journaliste pour lui faire remarquer que dans ce cas pourquoi les renvoyer plutôt que de les juger pour les « crimes » commis ?

Ce 29 septembre, le Ministre de la Justice, Koen Geens (CDNV), publie un communiqué de presse dans lequel il rappelle la loi :

« Le ministre de la Justice Koen Geens peut comprendre qu’il est parfois difficile pour les services de police d’interpeller des personnes en séjour illégal dans notre pays et de procéder à leur expulsion, certainement lorsqu’ils sont retranchés dans un immeuble.

La procédure de flagrant délit n’est par ailleurs pas automatiquement applicable à toutes les infractions commises tel que le séjour illégal sur le territoire de notre pays.Le flagrant délit doit précéder l’entrée dans l’immeuble et ne pas être constaté après l’entrée. A défaut, cela viderait de leur substance les règles en matière de perquisition sur ordre d’un juge d’instruction et par conséquent la protection du domicile. L’inviolabilité du domicile est en effet un principe constitutionnel important dont on ne peut s’écarter que dans les cas prévus par la loi et dans la forme qu'elle prescrit, telles que, par exemple, les conditions prévues à l’article 27 de la loi sur la fonction de police.Une perquisition effective en vue de constater un délit exige dès lors une autorisation par une autorité judiciaire. La loi sur les étrangers pourrait cependant prévoir une procédure plus souple si cela parait opportun mais uniquement moyennant les garanties juridiques nécessaires.»

Que s'est il passé?

Ce 21 septembre à 5h du matin, une trentaine de policiers de la Police fédérale, en tenue de combat, investissent par les toits un immeuble situé à Molenbeek, boulevard Léopold II, sans sommation. A moins que l'on considère que le bruit de l'hélicoptère, des sirènes, et des 200 policiers, dont une partie investit le bâtiment par la porte d'entrée tienne lieu d'avertissement légal pour les habitants encore endormis.

Cet immeuble, occupé depuis deux ans avec l'accord du Juge de Paix, et dont la liste des habitants a été transmise à la commune, et remise à jour régulièrement, est le domicile connu d'environ 150 personnes depuis juillet 2014. Un arrêté de la Bourgmestre de Molenbeek, a cependant ordonné l'évacuation des lieux pour raison d'insalubrité, en juillet 2016. La Voix des sans-papiers, a donc déménagé le 13 septembre. Ce 21 septembre, il ne restait plus dans les lieux que 14 personnes. Que faisait là, ce dernier carré ? Elles attendaient, espérant naïvement, que le conseil communal extraordinaire qui devait se tenir le vendredi 30, modifie l'arrêté d'expulsion et leur rende la jouissance de leur habitation moyennant quelques travaux (déjà évalués).

De grands criminels ! Vraiment ?

Tous les voisins confirment qu'en deux ans aucun incident n'est à déplorer pour le voisinage, que les sans-papiers y vivaient pacifiquement, et en bonne entente avec le quartier qui par ailleurs fit preuve de solidarité au quotidien.

Cette démonstration de force policière est bien une démonstration. Une volonté de désigner des boucs émissaires, de créer la peur sur un mensonge, par une action par ailleurs illégale. Aucune plainte déposée, aucun « flagrant délit », aucun mandat judiciaire.

Ce 30 septembre, vers 8h30, plus de cent personnes se rassemblent devant le Palais de Justice de Bruxelles, parmi eux de nombreux membres de la Coordination des sans-papiers, ainsi que des membres de diverses associations et syndicats FGTB,CSC, LDH, SOS-Migrants, Ciré, Mrax. Tous viennent soutenir les 12 sans papiers arrêtés qui passent en comparution en vue de leur libération ou de leur maintien en détention dans des centres fermés.

L'argumentation de leur avocate est simple : l'arrestation de ces personnes étant illégale, la détention qui en est la conséquence l'est donc également. L'argumentation de la Procureure, elle, fait froid dans le dos; la Police, d'après elle agit comme elle veut quand il y a une nécessité . Justement, la nécessité n'est pas démontrée, et la méthode est en dehors des règles légales. Sans doute n'a-t-elle pas lu le communiqué du Ministre de la Justice. Non ! Dans notre Etat de Droit, la police ne dispose pas d'un pouvoir discrétionnaire.

La décision de la Juge est tombée dans l'après-midi : la détention est maintenue.

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L'avocate a interjeté appel immédiatement. Le recours est suspensif d'une expulsion éventuelle.

Il ne reste plus qu'à espérer que l'Office des Etrangers en tiendra compte et que la procédure en vue de la libération des 12 sans-papiers pourra suivre son cours.

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