Procureur ou la mémoire entre les fils
Jean-Paul Procureur, journaliste humainement engagé, ex-enquêteur de Cartes sur Table (RTBF), écrit depuis toujours. Il en a rédigé des dossiers, des conduites d'émissions, des questions parlementaires et des tribunes libres, sous des formes diverses. Et aussi des romans qui sonnent comme de longues lettres. "La vie est belle, parfois", qui vient de paraître, serait une tentative de mode d'emploi du quotidien. Sous un ciel passant du soleil à l'orage sans compter les rafales de vent et la pluie qui redessine les contours d'une maison au bord d'un canal, quelque part à la frontière; des personnages rêvent, souffrent, aiment, cherchent, se rencontrent, se retrouvent, s'accrochent, se raccrochent, franchissent des cols de montagne en danseuse. Après la crève de la pente en haut un bistrot sympa sera bien ouvert? Signe d'espoir...
Pour Procureur, relier les fils des mémoires dans le terreau des souvenirs c'est faire pousser des plantes sauvages dans ces labyrinthes dont on croit qu'il y aura bien une manière de sortir. C'est peut-être pour cette raison que le personnage créé par Procureur semble avoir découvert une matriochka dans une valise oubliée, avec des récits qui s'emboîtent. Son roman mêle les générations, les trajectoires, l'amour de la vie et et les morts. Le lecteur finirait par se retrouver dans ce jeu d'ombres. Le personnage qui témoigne n'a pu confier à sa mère la peine d'avoir traversé une maladie dure et d'avoir sauvé sa peau. Le narrateur réalise l'ancrage qu'est pour lui cet être qui l'a mis au monde et c'est ce qui compte, avant tout le reste, tout le bazar.
C'est que la mère a déjà perdu un fils. Qui lui-même a laissé derrière lui l'ébauche d'un roman inachevé. Une histoire d'amour. Le frère survivant lit et relit les lignes du compagnon de dérives cyclistes qui l'a laissé sur place. Il se hasarde à corriger, interpréter, insérer çà et là des fragments de pages vécues par d'autres. Lui-même, des proches, qui? Bof... Tout se conjugue. On écoute le narrateur parler de Van Gogh et d'Auvers-sur-Oise et aussi du Borinage, de voyages dans le Haut-Atlas, on se balade à pied, en auto, à vélo ou en train. On voit monter des avions dans le ciel, boit du vin et de l'Amer Labiau, écoute des chansons et du jazz et on somnole dans des salles d'attente. Le livre recoupant la réalité, dans un hall de gare,on ouvre à nouveau "La vie est belle, parfois".Le train Tournai-Charleroi arrive un peu trop vite. On continue à lire en regardant par la fenêtre la vie qui va cahin-caha, caramba, c'est comme ça.
"la vie est belle, parfois". Par Jean-Paul Procureur. Roman. Collection Encres de vie. Editions L'Harmattan.
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