Dyslexie institutionnelle belge

Poing de vue

Par | Journaliste |
le

Il paraît qu'elle fait la force. Photo © Jean Rebuffat

commentaires 0 Partager
Lecture 3 min.

Les effets pervers sont là pour nous rappeler que l'enfer est pavé de bonnes intentions. Comment assurer la pérennité d'une majorité? En rendant presque impraticable le renversement des gouvernements régionaux belges, le législateur a créé les conditions d'une de ces péripéties dont on souligne, avec un soupir qui tient autant de la fierté que de la résignation, qu'elles ne peuvent décidément se produire que dans le pays du surréalisme.

Ce vendredi à 13 heures, dans un rendez-vous du genre de celui de Phileas Fogg au Reform Club, une motion de défiance constructive (vive le paradoxe!), 38 des 75 députés wallons s'apprêtent à renverser l'attelage PS-CDH et à le remplacer par une majorité MR-CDH. Le président du CDH triomphe: il a débranché la prise et après une longue agonie d'un mois, le gouvernement Magnette est mort. Il y avait trois ministres CDH, il y en aura trois sous le férule Borsus (un nom de consul romain!), on voit tout de suite l'intérêt. Le PS étant aux yeux vertueux de Benoît Lutgen devenu infréquentable, on se demande pourquoi la ministre CDH du gouvernement bruxellois reste en place, mais les desseins du Très Haut sont impénétrables. Quant au gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, connue constitutionnellement sous le nom de Communauté française, il est paraplégique. Riche idée, aussi, pour solidariser capitale et Wallonie, que de fusionner à moitié les exécutifs et les assemblées! Il y a désormais des députés et des ministres qui sont ici dans l'opposition, là dans la majorité...

Bien sûr, il faut lire tout cela dans la perspective de 2018 et de 2019, années électorales. Le Premier ministre fédéral a envie de repiquer au truc. Le MR veut tout, il prend déjà la Wallonie. Pratique, l'excuse éthique antisocialiste! Mais alors, expliquez-moi pourquoi le MR est la seconde roue de la charrette à Bruxelles-ville, haut-lieu du scandale Samusocial? Et pourquoi à Uccle le CDH ne juge pas infréquentable un MR dont le très récent ex-bourgmestre est empêtré dans le Kazakgate?

Il semble que vous appréciez cet article

Notre site est gratuit, mais coûte de l’argent. Aidez-nous à maintenir notre indépendance avec un micropaiement.

Merci !

Les indignations, elles aussi, doivent être sincères pour être crédibles, et non pas à géométrie variable.

On souhaite bien du plaisir aux négociateurs des majorités communales, régionales et fédérales en 2018, 2019 et – qui sait? peut-être même en 2020... Sans compter qu'entre pactes de bonne gouvernance, réformes de l'État (sixième, septième?) et des pouvoirs locaux, il y a encore quelques prises à débrancher. Et sur quoi tout cela débouchera-t-il? Sur des complications institutionnelles supplémentaires. C'est une longue tradition en ces contrées: l'étude des institutions bruxelloises indique déjà qu'au Moyen Âge, on ne supprime jamais rien, on superpose. Jusqu'à produire des trucs aussi compliqués à construire et à faire fonctionner qu'une station orbitale. Il est vrai qu'en ce vendredi 28 juillet 2017, c'est la 27ème nuit des étoiles. On brille comme on peut.

commentaires 0 Partager

Inscrivez-vous à notre infolettre pour rester informé.

Chaque samedi le meilleur de la semaine.

/ Du même auteur /

Toutes les billets

/ Commentaires /

Avant de commencer…

Bienvenue dans l'espace de discussion qu'Entreleslignes met à disposition.

Nous favorisons le débat ouvert et respectueux. Les contributions doivent respecter les limites de la liberté d'expression, sous peine de non-publication. Les propos tenus peuvent engager juridiquement. 

Pour en savoir plus, cliquez ici.

Cet espace nécessite de s’identifier

Créer votre compte J’ai déjà un compte