La tolérance comme suite de l'échec

Poing de vue

Par | Journaliste |
le

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La tentation du manichéisme est certainement dopée par l'air du temps où le sens de la nuance est volontiers occulté par le simplisme des opinions et des sentiments, qui plus que jamais, aboutit au rejet de l'autre et au renforcement de ses propres convictions. Tout y contribue. Adieu la bienveillance, qui reste pourtant une condition de la tolérance.

La tolérance, ne l'oublions jamais, n'est pas née d'une belle idée transcendant les transcendances, mais d'un constat guerrier traduit en ambition philosophique: on n'arrive pas à éradiquer l'autre, tout simplement. En ce sens, la révocation de l'édit de Nantes est très exemplaire. S'en est suivi un exode massif de populations et pour celles qui restaient, des mesures dans lesquelles, on s'en doute, les droits humains auxquels on dit attacher tant d'importance aujourd'hui, étaient foulés au pied. Le viol, la spoliation, le meurtre, tout était bon pour convaincre les réticents. Eh bien cela n'a pas marché. Après deux siècles de guerres de religion, si le XVIIIème a vu émerger les Lumières, c'est aussi parce que l'épuisement était général. Les guerres du Moyen Âge, aussi dévastatrices fussent-elles, concernaient moins les gens dans leur intimité et pour tout dire, moins dans leur vie quotidienne.

La théorisation de la tolérance, dont le nom même indique bien ce à quoi elle devait servir, tolérer, c'est-à-dire aussi supporter avec patience ou résignation ce qu'on trouve injuste, anormal ou étrange, bref, supporter parce qu'il n'y a de toute façon pas moyen de faire autrement, a abouti à la philosophie qui règne théoriquement sur la planète aujourd'hui – même si dans la pratique, cet apparent triomphe des beaux principes est souvent battu en brèche, jusqu'ici, ils résistent encore au niveau des objectifs définis, la paix, la concorde, la justice, l'équité.

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La tentation de contraindre continue cependant à sévir et elle déteint désormais jusque dans certaines opinions inquiétantes dont nous allons reparler. L'exemple du conflit israélo-palestinien, qui flambe une nouvelle fois, est très exemplaire de cet enchaînement qui déshumanise l'autre, ouvrant l'escalade qui peut aboutir jusqu'au génocide, et de cette crispation mentale qui transfère le problème un peu partout dans le monde, chacun désignant ses bons et ses méchants sans comprendre les enjeux et les causes – notamment les raisons internes aux deux camps. Une armée, régulière ou non, a toujours comme finalité proclamée de défendre mais comme conséquence l'envie d'user de sa puissance et aussi, de se mêler un peu trop de l'ordre, soit qu'on le leur demande (pensons aux mesures qui suivirent les attentats en France et en Belgique), soit qu'elle finit par estimer que cela la regarde.

Et apprendre que 58% des citoyens de la République approuvent la fameuse tribune d'un quarteron d'officiers en retraite dans Valeurs actuelles, dénonçant un délitement qui frapperait le pays et annonçant un éventuel soutien aux politiques qui prendront en considération la sauvegarde de la nation n'est pas là pour rassurer. Pétain n'est pas très loin et il n'y a pas qu'en Birmanie que cela se passe.

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