Mourir mal à propos

Jean d’Ormesson avait estimé, en commentaire de la mort de Jean Cocteau, qu’il ne fallait pas commettre l’erreur de mourir le même jour qu’une vedette de la chanson, Édith Piaf en cette circonstance. Il connut lui-même une mésaventure identique, ayant quitté le royaume des vivants en même temps que Johnny Hallyday. Mais sa remarque est fondée et elle est revenue en force cette semaine avec la mort de Benoît XVI que l’on n’a pu s’empêcher de comparer avec celle de Pelé…

Benoît XVI fut pour l’Église catholique une erreur de casting majeure opportunément réparée par la démission de ce pape dont l’avenir retiendra surtout qu’il fut le premier à démissionner depuis le Moyen Âge. Pelé, lui, restera dans l’histoire. La vraie religion d’aujourd’hui, comme on l’entend répéter pour le continent sud-américain, c’est bien le football, qui sanctifie des hommes dont pourtant la part d’ombre est difficilement occultable. Maradona était un tricheur patenté, drogué jusqu’à la moëlle, se sentant au-dessus des lois communes (pensez à sa célèbre main de Dieu…). Pelé, tant encensé, n’était pas que l’un des plus grands manieurs de ballon de l’histoire du foot. Il eut des ambiguïtés suspectes avec la dictature militaire et fut le pionnier et le prophète de ce merchandising humain qu’est devenu le foot, se liant à des firmes dont l’éthique n’était pas plus claire qu’une délibération du Var devant les images en 3D d’un hors-jeu. Mais à bien y réfléchir, un nombre considérable de saints étaient de leurs vivants d’abominables crapules totalitaires (tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens) à côté desquels les errements des nouveaux prêtres apparaissent véniels. Ou même le fait d’avoir porté l’uniforme des Jeunesses hitlériennes.