"Tu balaieras demain"

Poing de vue

Par | Journaliste |
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Le 8 mars s'universalise mais a-t-il le même sens partout? Photo © Tomathon D.R.

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Il est difficile de ne pas entendre qu'en ce 8 mars 2019, comme tous les 8 mars depuis bientôt un demi-siècle, c'est la journée des droits de la femme, jadis appelée communément journée de la femme, ce qui en montre déjà l'évolution. Du «laisse, tu balaieras demain» au «nous sommes égaux, nous sommes égales» qui est en route, l'histoire est en marche depuis... à peu près ma naissance.

C'est en effet à la fin de la seconde guerre mondiale (je suis né en 1947) que bien des pays, dont la France et la Belgique, ont accordé le droit de vote aux femmes et que depuis, le mouvement est uniformément accéléré et ne s'arrêtera, selon toute vraisemblance, qu'au jour J où tous ces beaux principes seront une réalité concrète et quotidienne.

Sans vouloir faire de mon cas particulier une règle générale, je suis tenté d'écrire que les hommes y ont autant à gagner que les femmes. Même si le sexisme ordinaire a l'air d'avantager ceux qui disposent d'un chromosome Y à côté du X, quand une société est figée, ses règles peuvent être cruelles pour les supposés dominants. Il y a quarante ans, par exemple, la garde des enfants en cas de divorce était conférée par défaut à la mère. Et si celle-ci était vraiment défaillante et que, cas rarissime, le père obtenait la garde des enfants, s'il avait reconstitué un couple, c'était sa compagne qui touchait les allocations familiales...

Les hommes (XY) sont-ils trop bêtes pour comprendre les avantages de l'autonomie? Aujourd'hui, ce n'est pas qu'ils refusent de faire, c'est qu'ils ne font que si on leur demande. La fameuse charge mentale n'est pas encore équitablement partagée et très souvent, comme si c'était naturel, c'est implicitement à la femme que revient les tâches organisationnelles. Les hasards des circonstances de mon existence m'ont appris combien cette charge peut être fatigante et même nuisible au plan professionnel («Il part toujours à 18h00 pour aller chercher ses enfants à l'école»). Peu à peu, au cours de ma vie, j'ai appris combien tous ces rôles stéréotypés sont purement culturels. J'ai dû apprendre les gestes ancestraux des femmes et me débarrasser des comportements insidieusement phallocrates (1), en suis-je mort, suis-je meilleur qu'un autre? J'en doute. Aujourd'hui, quand je dis à la compagne d'un de mes plus jeunes fils (elle a vingt ans) que quand j'avais son âge, j'ai commencé dans une rédaction où les journalistes étaient tous des hommes et où les seules femmes tolérées étaient les dactylos, je me rends compte qu'en réalité, j'ai vécu pratiquement toute cette gigantesque évolution, que celle-ci n'est pas terminée mais semble irréversible, sauf que les mouvements populistes ont le vent en poupe et qu'ils constituent aussi une menace pour les droits des femmes (et les progrès éthiques)... et qu'elle est limitée à un nombre de pays plutôt minoritaire.

Comment disait-on, encore? «Ce n'est qu'un début, continuons le combat.»

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Photo libre de droit à créditer à Tomathon https://www.flickr.com/photos/42657964@N00/5173531550

(1) Il y en a un que je refuse d'abandonner: c'est la galanterie. Je sais que c'est aussi une forme sournoise de la phallocratie, mais la courtoisie et la tolérance me semblent cousines. Je pense que le phallocrate véritable est galant avec les femmes et goujat avec les hommes.

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