Lazare

Une édition originale

Par | Penseur libre |
le

© Serge Goldwicht

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Lecture 3 min.

C’est la musique plaintive et molle de l’église qui l’a ressuscité. Nom de Dieu ! Ils auraient au moins pu mettre Dalida comme il l’avait demandé ! Décidément, cette musique de supermarché d’église lui cassait trop les oreilles, il décida de s’en aller mais avant tout, il fallait sortir de cette boîte dans laquelle on l’avait enfermé. Après trois ou quatre coups de pieds bien violents, Bam, bam, bam ! le couvercle de la boîte céda et il sortit une jambe, puis l’autre sous les Ooooh effrayés de l’assistance, une trentaine de personnes, qui reculèrent vers la sortie. Il était bien dans une église et il y avait un crucifix sur le cercueil. Il jeta un regard assassin à son ex- femme qui l’avait à nouveau trahi: « J’avais dit Pas dans une église et pas de crucifix ! Tu sais bien que je ne suis pas croyant. Et Dalida, Et Hervé Vilard ? je ne les entends pas ! Tu m’as trahi ! Je t’avais demandé Dalida et Hervé Vilard pour mes funérailles !

- Pardonne moi, Charles, mais j’ai subi des pressions, tu es parti depuis si longtemps bégaya son ex-femme en deuil, cette garce terrorisée qui courut hors de l’église en hurlant de peur. Il se leva de son cercueil comme Lazare et sortit de l’église lui aussi. Cette musique plaintive était affreuse. A l’extérieur, sur le parvis, il vit des gens qu’il connaissait, des amis pour la plupart qui se cachaient derrière des arbres, des poubelles et des voitures. Ils avaient peur. Il s’approcha de son meilleur ami qui, terrorisé, lui dit : « Ne t’approche pas Charles, ne t’approche pas. Je t’en supplie ! »

Il quitta le parvis d’un pas décidé. Il devait avoir une mine de mort affreuse parce que tous les passants s’écartaient sur son passage et s’enfuyaient en hurlant de terreur. Il découvrit le reflet de son image dans la vitrine d’un magasin C’est vrai qu’il n’est pas beau à voir. La rigidité cadavérique lui ouvre la bouche dans une affreuse grimace , la plupart de ses cheveux sont tombés en poussière et il est blanc, tellement blanc. Il marcha longtemps en terrorisant tout le monde sur son passage. Arrivé devant la maison où il avait abandonné femme et bébés, il y a longtemps, il sonna. Un garçon d’environ sept ans ouvrit la porte et s’écria : « Papa ! » en se jetant dans ses bras. La petite sœur regarda la scène mais se tint à l’écart.

L’homme fut étonné de cet accueil : « Je ne vous fait pas peur ? demanda-t-il d’une voix d’outre-tombe.

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- Je ne savais pas à quoi tu ressemblais mais si tu ressembles à çà, c’est bon. Tu es mon Papa ! répondit le gamin en serrant l’homme de toutes ses forces.

La petite fille lui dit : « Bonjour Monsieur, vous êtes notre Papa ? Tous les jours, on vous attend en regardant à la fenêtre. On croyait qu’on n’avait pas de Papa. ». Les enfants observent ce cadavre debout avec des yeux émerveillés. Et pour la première fois, l’homme regretta d’être mort deux fois.

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