À la recherche de la grâce perdue

Poing de vue

Par | Journaliste |
le

Capture d'écran du débat télévisé du second tour de la primaire de la droite

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Lecture 3 min.

François Fillon n'est pas ma tasse de thé: il a tout pour me déplaire. C'est un conservateur catholique de tradition française. La France n'est pas que la patrie des droits de l'homme et d'une révolution fondamentale, c'est aussi la fille aînée de l'Église. Mais il a raison sur un point: on lui fait un mauvais procès. Alors qu'il n'est même pas encore élu à la candidature, le bashing a commencé. Cela augure mal de la suite.

Souvenez-vous, cela ne fait pas si longtemps... On appelait ça l'état de grâce. Un terme bien chrétien, soit dit en passant. François Mitterrand, par exemple, en avait largement bénéficié. On donnait sa chance au nouvel élu. Désormais c'est terminé et la posture inverse a été prise. Le président de la République française est par définition un nul qui discrédite sa fonction. Certes, des éléments objectifs militent en ce sens quand on envisage les deux derniers en date mais de façon générale, tout se passe comme si la nuance était devenue impossible. C'est je like ou je bashe. Or les deux présidents précédents ont eu de bons moments. Pour ne citer que Nicolas Sarkozy, l'ultime année de son quinquennat avait été la moins mauvaise et il arrivait qu'il y ressemble à un président. (D'ailleurs l'homme est capable de bonnes choses: ses discours d'adieu sont excellents.)

Voici donc Fillon qui déboule dans son fameux sillon et soudain on découvre qu'il a un programme droitier et des conceptions religieuses qui le rendraient dangereux pour les lois éthiques. Or c'est plutôt Louis XVIII que Charles X ou, si l'on veut une comparaison royale belge, plutôt Albert que Baudouin: il n'a jamais mélangé, dans ses votes ou dans ses actions, sa conception du monde et l'état de la société. Comme individu, il a parfaitement le droit d'aller à la messe et de penser que l'IVG est une mauvaise chose. Comme homme politique, cela ne se voit pas tellement. Le seul retour en arrière qu'il propose, c'est d'encadrer différemment l'adoption par des parents homosexuels et voulez-vous parier que cela ne se fera pas?

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Alors au lieu de redouter une catholicisation de la France, j'estime qu'il vaudrait mieux se focaliser sur un programme économique archaïque qui pourrait être dévastateur. Même l'Union européenne, où la droite est si puissante, commence à douter du bien-fondé des politiques actuelles, et voici qu'on nous ressert Thatcher! Du coup, Alain Juppé, en face, apparaît comme un modéré alors que son programme est à peine moins menaçant...

L'opinion publique française ferait tout de même bien de comprendre qu'une part de la décrédibilisation de la fonction présidentielle est aussi de sa propre responsabilité. À force de pilonner ceux qui sont aux affaires, et même avant qu'ils y soient, personne n'a plus confiance en rien. Il y a de quoi frémir, tout de même, avec la perspective d'un second tour entre François Fillon et Marine Le Pen, non? De quoi regretter le bon vieux temps du face à face Jacques Chirac - Jean-Marie Le Pen...

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