Du cinéma en conserve

l’œil et l’oreille

Par | Journaliste |
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Reconstitution à Lyon au musée des confluences d'une salle à l'époque des débuts du cinématographe. Grand écran, qui a dit grand écran? Photo © J. Rebuffat

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L'inaccessibilité des salles de cinéma en période de confinement (n'ayons pas peur des mots) incite à réfléchir sur la nature même du 7ème art. Un grand écran, désormais, n'est plus l'apanage du cinoche de votre quartier (s'il en reste...) ou du multiplex tout confort dans lequel vous arrivez encore parfois à échapper au blockbuster du moment. Amusant d'ailleurs de noter que l'on utilise pour les microsalles ou les cinémas d'art et d'essai le terme de «pour cinéphiles», ce qui incite à penser les mauvais esprits comme celui qui m'anime généralement que ceux (et celles, pas de sexisme) qui fréquentent d'autres lieux ne le sont pas, cinéphiles, et que donc, ces créatures étranges et aussi nombreuses qu'un coronavirus en come back, n'aiment pas ou s'en foutent, du cinéma.

C'est un peu court. On fait moins la distinction quand on parle de littérature. Vous lisez Marc Levy?Très bien. Vous lisez Patrick Modiano? Très bien. Très bien puisque dans les deux cas vous lisez et que c'est très bien, de lire. Observons aussi finement qu'il arrive que des films d'auteur atteignent le succès massif. François Truffaut n'a pas fait que des bides (néanmoins intéressants) comme La Chambre verte.

Avant cette digression, je disais ou voulait dire que le grand écran, au fait, ça ne veut plus dire grand-chose (le cinéma a d'ailleurs été longtemps met, ah ah ah). La taille des écrans de télévision se rapproche de celle dont disposaient les frères Lumière et même celle des ordis, tiens. J'écris ceci sur un portable branché à un écran de 26 pouces. À deux ou trois mètres, je peux très bien regarder les films en conserve disponibles sur les télés ou les sites de VOD sans avoir l'impression d'être devenu un philatéliste myope.

La conserve, certes, est au cinéma ce qu'elle est en gastronomie. Rien ne vaut le frais mais il faut bien se nourrir. Tiens, revenons-en à Truffaut, j'ai vu qu'on passait Vivement dimanche. Outre que ce fut son dernier film, il est plein de charme et d'habileté – et répare une incongruité: Truffaut n'avait jamais tourné avec Jean-Louis Trintignant et le regrettait. En prime c'est un polar amusant, on sait les liens entre l'auteur et Hitchcock, qu'il a grandement contribué à sortir de la catégorie (méprisée par les ayatollahs de la critique) de spécialistes des films grand public en démontrant que c'était du vrai cinéma et qu'il était un véritable auteur. Truffaut n'aimait pas qu'on distingue les catégories. Il aimait tout le cinéma. Enfin là j'exagère. Il aimait tout le cinéma qu'il trouvait bon et comme critique, il s'est révélé parfois outrageusement injuste, notamment en flinguant avec brio un certain cinéma français de qualité qui n'était pas toujours aussi mauvais que la polémique engendrée le disait. Il aimait tous les genres, le polar, la SF, le drame, la comédie, la mise en abyme, l'adaptation romanesque, le scénario original, le film d'époque ou celui d'aujourd'hui (qui fait désormais époque). Je vais ressortir mon coffret de DVD de l'intégrale. Une bonne conserve c'est mieux que de la junk food.

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