Mickey dans mon salon

l’œil et l’oreille

Par | Journaliste |
le

C'est lui qui a rendu Paul Dukas immortel.

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Le cinéma, en fait, c'est quoi? Et quelles différences y aurait-il avec la télévision (plusieurs ou une?)? En ces temps de confinement, faute de salles obscures, fatalement, je suis comme tout le monde contraint de me rabattre sur les écrans qui peuplent mes domiciles et cela incite à ce type de réflexion.

Au départ le cinéma c'est de la photo en mouvement. En noir et blanc. Au début, quelques scénettes, depuis la sortie des usines Lumière: l'entrée du train en gare de La Ciotat, l'arroseur arrosé... Ah, l'arroseur arrosé! Tout de suite les esprits ouverts ont perçu la possible scénarisation des films, leur éventuelle veine comique ou onirique, bref que ce n'était pas qu'une photo animée. Pas du théâtre, non: le cinématographe était muet (il y a des films, je vous jure, qui font regretter cette époque bénie). D'ailleurs pour gommer ces différences, d'emblée très sensibles, le cinéma se mettra à parler et à se colorer et donc aussi ressembler au théâtre, à l'opéra et au concert. On peut le regretter (comme j'aurais aimé entendre les impros au piano d'Erik Satie dans une salle parisienne d'il y a un siècle!) mais c'est comme ça que ça s'est passé et on n'y changera rien, Marilyn.

Est-on arrivé au bout de tout cela? La télé, qui est concurrencée par des écrans plus petits qu'on peut avoir en poche ou dans le cartable, a ces dernières années muté en direction du cinéma, en aplatissant et agrandissant les écrans ainsi qu'en se dotant de barres son capables de faire tressauter les sismographes, sans compter la qualité de l'image, qui n'ont plus rien à voir avec les 625 lignes de Papy. Et v'là-t-y pas qu'en prime, on commence à faire des films qui soit faute de grands écrans sortent en VOD plutôt qu'en salle soit sont directement conçus pour. Mais je vais vous dire: il subsiste deux différences essentielles.

La première c'est qu'au cinéma – comme au théâtre et à l'opéra, d'ailleurs – il s'agit d'une représentation. Il y a un cérémonial, un rituel, le silence qui se fait (juste troublé par des malotrus ou des mastications de pop corn); on ne peut pas pousser sur le bouton pause. La seconde n'en est pas très loin, à bien y réfléchir: il s'agit d'une sortie. On doit y aller. Il y a des préparatifs; l'improvisation absolue est impossible.

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Prenons un exemple: si l'envie vous prend de regarder The Queen's Gambit sur Netflix, elle peut être assouvie en moins de trente secondes. Et pas la peine d'éteindre le lampadaire! Pire, vous pouvez arrêter la scène où vous voulez pour aller chercher du pop corn ou regarder votre téléphone; vous pouvez beugler vos commentaires au lieu d'en susurrer un à l'oreille de votre partenaire – ah le geste vers le cou de l'être désiré, ce lent rapprochement qui en suggère ou présage d'autres...; et si ça vous enquiquine vous arrêtez de regarder. Voire vous passez en vitesse accélérée. Hé, les mecs, ohé les nanas! Un film c'est fait pour être regardé du début à la fin en passant par le milieu, au rythme voulu par l'auteur, à la fin! Voulez-vous que Jeanne Dielman cuise sa côte de porc en vingt-sept secondes? Z'avez déjà essayé de manger une côte de porc cuite en vingt-sept secondes?

Bon, retour dans mon salon. Je voulais vous parler cette semaine de ce gambit déjà évoqué – est-ce ou non un échec? – mais comme je n'ai pas fini la série, qui est au film ce que le roman fleuve est à la littérature, vous devrez patienter jusqu’à la semaine prochaine. D'ici là, je vous laisse avec un de mes personnages préférés, qui fêtait cette semaine son 92ème anniversaire: Mickey Mouse. Pour moi, le dessin animé est la quintessence du cinéma. Rien n'y est interdit au niveau technique et je déteste cette manie actuelle de voir les dessins animés devenir des films réalistes. Je lance cet appel aux studios Disney: conservez l'héritage de Walt, gardez donc votre Mulan dans vos tiroirs! Il était chouette comme ça, ce film! Rappelez-vous ce qui arrive aux apprentis-sorciers... Tiens, je me remets Fantasia, ce soir!

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