Le naufrage et sa bouée
Selon une tradtion désormais bien établie, je me permets de vous signaler que ceci n'est pas une critique objective (comme si d'ailleurs cela pouvait exister) car je connais Ariane Le Fort. Mais je vous rassure aussitôt: j'achetais ses livres avant de la connaître et elle compte tellement peu sur moi pour accroître ses ventes qu'elle n'avait même pas pensé à me glisser dans la liste de ses services de presse quand son dernier roman, "Partir avant la fin", est sorti, voici déjà quelques mois bien sonnés. Donc si j'en dis du bien, c'est parce que j'aime les romans d'Ariane Le Fort, distingués mais âpres, avec des personnages bien quotidiens mais très signifiants derrière leur banalité. L'histoire? La narratrice a deux histoires d'amour, une très ancienne mise en sommeil et une nouvelle qui promet mais qui est compromise par l'autre, sans compter l'agonie interminable d'une mère qui perd la mémoire et qui désire que ses filles aillent avec elle à la mer (comme on dit en Belgique) pour l'y noyer. Heureusement la vieille dame ne pouvant plus descendre l'escalier qui de la digue permet d'accéder à la plage, nul crime euthanasique ne sera commis, mais si la vie continue elle n'est pas trop rigolote, surtout à Budapest quand, dûment convoqué, le premier amour vient rappeler à tout ce petit univers que les corps vieillissent. Moralité: si la vieillesse est un naufrage, comme l'observait déjà finement le général, il ne reste qu'à espérer que la bouée qu'on a choisie ne se dégonflera pas. Tout cela est quotidien comme la vie et derrière le paisible qui émane du dessin de couverture, il y a ces tourbillons invisibles pour autrui mais qui nous entraînent, pauvres mortels, et qui essaient de nous couler alors que nous sommes encore en train de nager. (Jean Rebuffat)
Ariane Le Fort, Partir avant la fin, roman, Le Seuil, Paris, 2018, 17€
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