Jean-Loup Nollomont: "Rajah, mes 2 yeux à 4 pattes"

Chemins de traverse

Par | Journaliste |
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L'écrivain, le chien et les livres,une grande histoire. Photo © Marcel Leroy

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Encastrée dans une rangée de façades de briques, la maison se situe au nord de Gilly, près de Charleroi. Toc toc, un chien aboie, la porte s'ouvre et Jean-Loup Nollomont présente Rajah, son golden retriever de trois ans: "Mes deux yeux à quatre pattes", dit-il. Démarre ensuite dans la cuisine une de ces conversations en zig-zags ponctuée de tasses de café dont bien des moments viennent vous tirer par les pieds quand vous cherchez le sommeil .

Jean-Loup aime les mots. Il jongle dans sa tête avec les lettres quand il va dans la rue avec Rajah, notamment pour se rendre à son travail. L'homme et le chien font équipe au guichet d'accueil de la SWDE. C'est la société chargée de la distribution d'eau en Wallonie qui a favorisé la publication aux éditions de l'Acacia du premier recueil d'aphorismes de son agent résolument littéraire. Titre de cet opus épuisé, "Les aphorismes de Jean-Loup". Lui évoque avec humour ses "carabistouilles", joli nom, pas vrai?

Depuis lors, Jean-Loup a sorti "Lapidaires" puis "Pensées nyctalopes". Toujours au Cactus Inébranlable, vint "Cécité interdite" puis, en autoédition, "Laissons pisser les urinoirs". Après une première salve de ses "Contes à rebours", il livrera sous peu un deuxième volume de ces courts récits entre poésie et dérision. Au hasard des pages, des exemples du style à la Jean-Loup? "Pas fâché d'avoir payé content", ou "Je vous téléphone pour prendre de mes nouvelles" et encore "Les gens distants sont ceux dont je me sens le plus proche". En exergue des "Pensées nyctalopes", il avertit le lecteur... "Qui préfère vivre en marge n'en meurt pas moins dans le texte". Et qui a suggéré avec pertinence, dans une brève bio du carolo né à Namur en 1960, cette vérité "Son champ de vision est intérieur et s'étend à perte de vue: il l'arpente nuit et jour, flanqué de son chien-guide spirituel Ashka".

Depuis Chocolat, son premier chien-guide, Jean-Loup a marché à l'unisson avec Ashka et aujourd'hui Rajah. Le golden participe à la conversation, d'un hochement de la tête ou d'un regard. Jean-Loup estime qu'il lui restitue l'autonomie partiellement perdue avec l'usure de ses yeux. Avec le chien, sur le chemin, il écrit dans sa tête, confiant. L'un et l'autre s'épaulent. Rajah porte une clochette à son collier. D'instinct, il interprète les nuances des propos de l'homme qu'il guide. Dans la tête du chien des itinéraires sont tracés. Il avance avec prudence, s'arrête chez le boulanger, va droit au boulot. Ses silences sont prolixes. Parfois il émet des sortes de vocalises. Jean-Loup comprend.

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Longtemps Jean-Loup a écrit à la main sur du papier au son des mots déroulant leur fil. Puis l'ordinateur et la synthèse vocale lui ont permis de continuer à lire et écrire. Il ne s'est jamais fait au Braille. La radio il l'écoute avec passion, les mots prononcés et les chansons écoutées le portent. C'est son cinéma préféré. Intérieur. Son interêt pour les jeux de mots lui vient de Raymond Devos, qui le fascinera toujours. Jean-Loup adore lire la poésie de Pessoa comme les romans de Franz Barthelt. Il ne manque pas "Le Masque et la Plume", sur France Culture et avance livre après livre dans une exploration qui le protège des blues passagers.

Comme midi vient, Jean-Loup ajoute qu'avant de se voir confier Rajah, au centre de Corteville, près de Lille, il a fallu voir si leurs caractères allaient de pair. "On choisit le chien en fonction de la personnalité de celui ou celle qu'il guidera. Si les pas s'accordent, le chemin continue, le chien et l'humain ne font qu'un..." Là, je pense à l'ami Rebuffat qui a balancé pour "entreleslignes" une de ces chroniques à sa manière où il évoquait des chiens et la vie. Et aussi à Francis Groff qui, ayant lu le papier de Jean, a pensé que Jean-Loup et Rajah valaient bien de prendre un chemin de traverse pour aller à leur rencontre.

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