L' instant illisible reste sans nom

A PA PEUR

Par | Penseur libre |
le
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Lecture 6 min.

On était dans la mouillasse, dans la sombritude des choses, dans l'art non-existentiel dont l'absence créait un manque impossible à combler... on était aussi dans une sorte d'ancienne mouillure pas vraiment sèche qui s'accrochait à nos restes que, péniblement, nous tentions de maintenir à un niveau encore acceptable pour sécuriser notre propre satisfaction.

Non, (ou plutôt si), ce n'était pas drôle de se sentir ainsi maintenu artificiellement en état de marche. Et comme de bien entendu, les voisins nous regardaient comme si nous étions revenus indemnes de certains camps de travaux concentrationnaires ! Ce qui était faux : on n'en revenait pas, on y allait ; mais eux, les spectateurs, ils ne le savaient pas. Ils s'accrochaient à l'idée qu'ils y avaient échappés et que, dans notre cas, eux, ils n'auraient pas tenu le coup. Alors que nous, les soi-disants rescapés de l'escarpolette, on avait l'air plus ou moins en état de marche... C'était pour se rassurer évidemment : c'est plus gratifiant de se dire qu'on y a échappé que de se dire qu'on va peut-être y rester.....monsieur de la Palice en aurait dit autant !

Savait-on qu'on y allait ? Savait-on que l'odeur du massacre de nos libertés nous effleurait les narines sans qu'on sache tout à fait si c'était une odeur réelle ou une mise à l'épreuve à l'aide d'une  fragrance due à notre imagination ?

On nous avait dit de marcher, nous marchions ; on nous avait dit de chanter, nous chantions ! Certes, c'étaient des hymnes parfaitement ineptes qui auraient pu passer pour des tubes à une autre époque, mais comme le chœur n'y était pas, ça devenait, à certain passage, un murmure d'halluciné où les paroles du poète nous passaient par dessus la tête ; ce n'est pas le chant qui permet de crier victoire, l'assurance du bruit des armes est plus gratifiant que les contre-ut de la diva de service !

D'ailleurs il n'y avait pas de diva, pas plus que de ténor patenté, ni de chef d'orchestre qui s'improviserait chef de chœur et qui essayerait de nous faire garder le rythme et, sublime tentation, qui aurait voulu nous faire marcher au pas !

Nous mettre au pas ! Ils y croyaient vraiment, ces enflés de la prostate et même qu'en plus, ils montaient le son ! Qu'est-ce qui leur passait par les ventricules à ces verrats aux carrures gonflées d'une fierté libidineuse, les couilles par dessus tête ? Non-non ! Parce que nous, les méprisés de la mollette striée, tout en y allant mollo-mollo, on restait le plus souvent tactiquement pantois, cachant tant bien que mal le rire jaune de notre hilarité glauque, aussi visible sur nos visages aux expressions déchirées que par les réponses ambiguës aux questions insensées concernant des problèmes que pourtant, on savait insolubles. Nos angoisses étaient aussi déchirantes que nos faciès adénoïdales, de ne pas savoir de quel coté tourner nos regards: fallait-il filer de ce coté-là, ou de coté-ci ? Fallait-il montrer le profil le plus flatteur afin de tenter de se définir tout en omettant l'essentiel ? Fallait-il se fixer un but tout en sachant qu'il n'y aurait qu'un seul choix possible qui aurait été, soit de montrer en effet, une belle grande gueule, menton en avant, sans rien cacher d'une certaine détermination, ou de faire profil-bas pour signifier qu'il y avait aussi un coté acceptable ! Si, vous savez bien : le « c'est possible », celui de l'innocence qui dissimulait vachement bien la réalité de notre détermination réelle ? C'était sûr et certain, on le savait depuis toujours : on demeurerait hermétique aux sollicitations grotesques d'un pouvoir en déséquilibre constant !

Oufti, mes aïeux, quelle affaire ! Quelle bizarre bizarrerie ! Quelle intensité dans le non-dit, dans l'absence de résolution spas-modique (pas tant que ça ), quelle absence de vérités dans le délire post-jubilatoire des ostentatoires déclarations qui, en principes ne se décernaient qu'aux nantis et aux ayant droits !

Bon ! Revenons à nos boutons d'ados, aux dantesques rassemblements de spitroules, de troudéçus, de malembrochés, de morleneux, d'érectophiles, de scatophages, de susselepus, de caressplaies et de passmwalbeurs : tous étaient dans le besoin, tous sont devenus des gargariseurs glottesques, tous étaient déterminés à laisser venir à la surface les éructations revendicatrices recensées heure par heure, pour ne garder que celles qui restent d'actualité, n'étant valables qu'au moment même de leur éclosion.

On n'était pas certain que l'efficacité allait être perçue mais qu'importe le flacon puisque l'ivresse du danger imminent devait se concrétiser en courses-poursuites à travers les champs de pissenlits à peine éclos, puis de jouer à cache-cache avec les chevaux qui ne pigent que dalle aux ordres de leurs cavaliers, lesquels manipulent la matraque avec la virtuosité d'un apprenti forgeron tapant sur l'enclume ou celle du bourreau novice qui abat l'hache (sic) sur le billot, passant, en passant de justesse par la nuque condamnée, laquelle se fend la pèche bien entendu !

Voilà pourquoi nous n'hésitions pas à hurler haut et fort, que nodidjo , la Vérité nous était due, vindiou ! Que jamais, nous n'avions été condamnés aux malheurs à répétitions, que la fameuse Sérénité promise, qui aurait pu et du nous atteindre, n'était jamais passée aux frontières des turpitudes, fichue Sérénité qui stagnaient dans la mélasse, nageant sur place, bloquant tout le bazar, et qui n'existait (Sérénité de merde) que dans l'imaginaire de ceux qui pensait que le père Fouette-tard s'était levé trop tôt (hahaha) !

Qui donc avait vidé le peu de ce qui restait de poudre du flacon de Sérénité, et qui la répandait langoureusement sur la couche de chocomerdapasta du p'ti-déj !

Morbleu !... les dés étaient pipés : les as sortaient plus souvent qu'à leur tour et les doubles six en faisaient treize à la douzaine sans pour cela susciter de hurlantes réprobations dans les rangs des amateurs avisés et surtout dans l'esprit de ceux qui croyaient en un avenir en rose.

On avait dépassé le stade de la peur au tripes, les coliques névritiques avaient cessés de nous réveiller lors de ces nuits où on se réveillait aux aurores matutinales (y en a-t-il d'autres?) les yeux grands ouverts sur notre destin, la fleur au fusil, l'esprit clair, le sourire aux lèvres, le verbe prêt à se lancer à l'assaut des malédictions, malgré que nous savions la fin programmée ainsi que la mise à feu du bûcher destiné à jouer à celui qui sera incinéré le premier.

Alors, disons-le une fois pour toutes : a pa peur.

 

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