Arrête tes Colloneries!

Journaliste punk

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Désolé pour la piteuse traduction de la citation; il faudrait lire "ça veut dire que vous vous êtes levé pour une cause".

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Dans un univers de communication où chacun peut s’exprimer à peu près librement, Dieu a bien du mal à reconnaître les siens. Le site «Infobelge», lancé par Drieu Godefridi, se trouve dans l’œil vengeur des éditeurs de presse. C’est le moment choisi pour un autre «informateur» de resurgir des tréfonds de l’oubli : j’ai nommé l’inénarrable Michel Collon. Et avec lui, son site «Investig’Action» et ses Colloneries délirantes.

Hamas ultra

Et pour faire quoi ? Pour traîner en justice mon confrère Marcel Sel du chef de diffamation et d’insulte. Qu’a-t-il donc dit de si affreux à l’encontre du petit baron du complotisme, défenseur du Hamas et du Hezbollah, supporter de la dictature « marxiste » de Nicolas Maduro, adepte de la victimisation, proche des thèses négationnistes du Réseau Voltaire ? «L’article comporte plusieurs affirmations et est en général écrit sur un ton qui sont gravement attentatoires à l’honneur de mon client. A titre d’exemple et sans que cette énumération soit complète vous traitez M. Collon d’antisémite, de "rouge-brun", vous affirmez qu’il "minimise" les attentats terroristes, que la collusion avec M. Collon est "irrémédiablement insoutenable"», mentionne le courrier de l’avocat reçu par Marcel Sel.

Quand bien même Marcel Sel a écrit cela - et on peut estimer que Collon ne fait pas grand chose pour le démentir dans les faits -, il me semble qu’en Belgique, la presse – blogs y compris – est libre et que lorsque quelqu’un s’estime injustement attaqué, voire diffamé ou insulté, la première chose à faire est de demander un droit de réponse. Ou d’exiger des preuves. Mais ce serait, pour l’avocat de Collon, Me Fermon, lui aussi sympathisant du PTB[1], reconnaître en l’espèce la possibilité juridique d’un délit de presse, ce qui lui compliquerait singulièrement la tâche. Il s’en est donc prudemment abstenu. Et a opté pour la manière forte, en général celle des faibles. Certes, s'exprimer n'est pas insulter. Encore faut-il balayer devant sa propre porte. Le discrédit jeté par Collon sur l'ensemble de la presse professionnelle est, à mon sens, une insulte et une diffamation à l'égard de tous les journalistes qui font correctement leur travail.

Le Juif utile

Quant à l’affirmation que Collon serait antisémite, il faut reconnaître qu’il fait de gros efforts pour que sa haine viscérale d’Israël échappe à la définition de l'antisémitisme, sachant que c’est là que se situe la ligne de démarcation, bien ténue, entre ce qui est légal et ce qui ne l’est pas. Sur son site «Investig'Action», où l’on trouve effectivement davantage d’activisme que d’investigation, on peut lire à cet égard une charge particulièrement virulente à l’égard de Viviane Teitelbaum signée d’un certain Rudi Barnet, qui met une énergie stupéfiante à vouloir démontrer à tout prix que les juifs ne sont nullement menacés en Belgique. Bien sûr, ce n’est pas de l’antisémitisme à proprement parler, puisque ça vise précisément à s’en exonérer et qu'il est répertorié parmi les auteurs du site de l'Union juive française pour la Paix. Mais personne n’est dupe : le procédé est, hélas, trop bien connu. La consultation d’Investig’Action rend par ailleurs particulièrement comique la plainte en diffamation de Michel Collon : les publications qu’on y trouve sont presque toutes, à des degrés divers, truffées de diffamations, de contorsions sémantiques, d’accusations et de mensonges en tous genres – comme quand on y lit que c’est Laurent Fabius (un Juif) qui aurait armé, certes indirectement, les terroristes de l’attentat contre Charlie et l’Hyper-Cacher. Faut oser !

Mais t’es qui toi ?

Peut-être certains d’entre vous ne connaissent-ils pas Michel Collon ? La lecture de sa page sur Wikipedia, qui n’a, de toute évidence, pas fait l’objet d’une action en diffamation, est assez édifiante sur le personnage. Se revendiquant «spécialiste de la désinformation», il faut lui reconnaître cette clairvoyance : ses publications sont des modèles du genre. J’ai déjà eu l’occasion de démontrer ses manipulations dont le principe est assez simple, à défaut d’être vraiment efficace. Prenons la vidéo (interminable) dans laquelle Michel Collon affirme, en 2012, dénoncer les « 10 médiamensonges d’Israël ». La recette est vieille comme tous les péchés d'Israël: vous amorcez avec une pincée de vrai, vous embrayez sur une once de logique et concluez par un pieux mensonge. Évitez d'argumenter et de citer vos sources. Emballez le tout en compagnie d'une série de témoins sans vous préoccuper de leur légitimité et servez chaud sur Internet, le bon peuple fera le reste.

Collonbophiles ou pigeons ?

Le bon peuple en question, c’est l’entourage du PTB, la "gauche compassionnelle", BDS, les défenseurs acharnés et inconditionnels du «peuple palestinien» qui sont les seuls à encore penser que Collon n’est pas un conspirationniste manipulateur. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : ce qui est écrit ci-dessus n’est nullement un plaidoyer en faveur de l’un ou l’autre camp dans ce conflit malheureux où la désinformation bilatérale tient le haut du pavé médiatique. Qu’il me soit permis néanmoins d’affirmer ici que la vraie cause du peuple palestinien est bien mal défendue par des gens comme Michel Collon, dont les interventions ont pour conséquence principale de nourrir la haine et d'attiser la violence.

Mais ne nous égarons pas : ce qui est insupportable ici, c’est que Monsieur Collon, spécialiste de la désinformation, ait le culot de porter plainte contre celui qu’il devrait, s’il était réellement journaliste comme il le prétend, considérer comme un confrère et non comme un ennemi à abattre. Mais peut-on considérer comme «journaliste» quelqu’un qui estime que «L’information est une affaire trop importante pour la laisser aux médias» ? A qui donc faut-il la confier ? À Michel Collon ? Le dénigrement systématique des médias traditionnels par Collon et ses copains d’Investig’Action présente évidemment pour eux l’avantage de se positionner comme seule source d’information crédible face aux «médiamensonges» systématiques d’une presse aux ordres du Grand Complot. Leur victimisation permanente procède de la même stratégie : discréditer tous ceux qui ne pensent pas comme eux afin de se donner le beau rôle.

Au fond, à gauche

En tant que libre-penseur, il m’est insupportable d’assister à une telle tentative de baillonnage. Il va sans dire que je soutiens sans réserve Marcel Sel dans cette triste querelle picrocholine et que je participerai, si nécessaire, à un crowdfunding lui permettant de faire valoir son droit à la liberté d’expression. Une liberté ici mise à mal par une soi-disant «gauche» très éloignée des préoccupations du monde des travailleurs, mais de plus en plus proche, par ce genre d’initiative, de l’esprit des régimes totalitaires qui ont mené la lutte des classes à sa ruine.

Encore bravo, et merci.

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[1] Contacté par mes soins, Marco Van Hees me confirme que le PTB n’a rien à voir avec cet incident et que les protagonistes ne représentent pas le parti. Dont acte.

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