Les Voyages de Cosme K de Philippe Gerin

Des Chemins d’écriture

Par | Penseur libre |
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Les Voyages de Cosme K de Philippe Gerin

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Lecture 6 min.

L’auteur, Philippe Gerin, est un voyageur, il connaît les grands espaces silencieux, les villes, leurs habitants, les croyances et les secrets qui les lient…ce texte est son deuxième (après «Du haut de la décharge sauvage » paru en 2013, chez le même éditeur), il nous emmène avec son personnage, le mystérieux Cosme K, vers les découvertes de soi, des autres et du monde, dans un récit d’apprentissage en forme de conte, une Odyssée moderne.


« je ne cherche pas les palpitations de l’aventure mais uniquement l’apaisement de l’exil »

Cosme K a 18 ans lorsqu’il entre dans la vie de Maïken qui vit en Norvège, à Andoïa, l’une des îles de l’archipel Versterälen. Elle habite une ferme, élève des lamas, aidée, depuis la mort de Jonas, son mari, par un vieil homme étrange qu’elle a recueilli, Bestefar.

La mort brutale de Jonas l’anéantit d’abord, mais elle est jeune, pleine de vie, une vie qui l’attire vers un jeune homme aux cheveux blonds rencontré sur le port, au prénom étrange de Cosme K. Ils auront une relation charnelle passionnée, forte comme les paysages de cette île, paysages de neige, de glace, de sombres forêts, de nuits polaires et d’aurores boréales. Immédiatement, on tombe sous le charme d’une écriture elle aussi passionnée, car l’auteur utilise une prose d’une intensité poétique puissante pour nous faire vivre à la suite de son personnage un voyage initiatique, et suivre avec lui les chemins étranges qui nous mèneront à la source d’un secret familial.

Apprenant que Maïken est enceinte de lui, Cosme K la quitte précipitamment, affolé par la nouvelle qui met en péril sa quête. Sur le seuil de la ferme, il trouve Bestefar qui lui tend une feuille qu’il ne prend pas le temps de lire, fuir d’abord.

Sur le bateau il découvre ce qu’a écrit Bestefar : « Krestovaya ». Toujours mû par sa recherche, Cosme K ne se pose pas de question et obéit à cette invite, il ira donc en Russie, où il va rencontrer Olga, une vieille femme, qui l’invite dans sa datcha d’été, au bord du lac Baïkal, dans la baie de Krestovaya.

Au bord de ce lac vivent sa nièce Irina avec son mari Saymone bientôt rejoints pour les vacances par leur fille unique, sourde et muette depuis « l’accident », Svetlana. A la suite de Cosme K nous entrons dans ce nouvel univers, toujours portés par cette écriture, ces images qu’utilise l’auteur pour nous faire ressentir à la fois la « terrible beauté » du lac, son énergie, ses dangers, les sourdes menaces qui pèsent sur ce paysage, la culpabilité de parents pleins d’amour pour leur enfant…culpabilité dont on comprend peu à peu que Cosme K ressent la même vis-à-vis d’un frère prénommé Kane…le K ajouté à son nom ? frère mort ? abandonné ?

Olga, qui avait reconnu en Cosme K le messager de sa mort prochaine, lui demande à quelques heures de sa fin, de prendre l’alexandrite, pierre aux couleurs changeantes dont elle ne se sépare jamais et qui lui a été offert par Ivan, l’homme aimé, l’homme contraint de s’exiler, et de le rapporter à celui-ci puisqu’il n’a jamais pu venir la retrouver. Ce sera l’ultime étape pour Cosme K qui va donc quitter le lac Baïkal pour Singapour, tout à la fois ville-monde et ville-jardin, où il devra chercher Ivan.

Je ne raconterai pas l’ultime étape de Cosme, ni la fin de ce récit car Philippe Gerin nous réserve une surprise qu’il ne me faut pas trahir. L’auteur, en effet, procède à de savants et ingénieux allers-retours dans sa narration, nous entraînant ainsi vers une plus grande étrangeté, une plus profonde fascination pour les personnages. Il veut nous faire connaître à la fois le sentiment d’appartenance viscérale à une terre que certains êtres éprouvent, sentant en eux la nécessité vitale d’y demeurer, d’y étendre leurs racines et le besoin tout aussi profond, pour d’autres, de la quitter, d’affronter l’exil auquel leur vie personnelle ou l’Histoire les a entraînés.

*les éditions Gaïa ont été fondées en 1991, à l’origine pour publier des livres du monde entier (Gaïa signifie Terre en grec ancien), belle ambition dont la fondatrice suédoise, Suzanne Juul, a cependant revu les contours pour s’attacher à publier des romans, des récits qui aident à découvrir le monde. Y sont publiés des écrivains suédois bien sûr, norvégiens, serbo-croates, allemands, français…Elles sont ancrées en France, diffusées par Actes Sud.
Pour les amateurs, tous leurs livres sont également disponibles en version numérique.
gaia-editions.com


Suite à l’article concernant Valentine Goby (« Murène », Entre les lignes, même rubrique, 20/11/19) comme promis, des dates concernant sa venue en Belgique pour des rencontres autour de son roman :

- Lecture rencontre autour de « Murène » à la Librairie Papyrus de Namur
le mercredi 18 mars à 20h
Réservation par téléphone au 081 221421 ou par mail à info@librairiepapyrus.be

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le jeudi 19 mars, à 19h30Pour de plus amples informations et pour réserver, vous pouvez téléphoner à la librairie au 04/379.77.91 ou envoyer un mail à loiseau-lire@hotmail.be

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