Quand la majorité de la population perd, c'est le démagogue qui gagne.

Humeurs d'un alterpubliciste

Par | Penseur libre |
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Révolution cubaine, de leadership en démagogie. Où est la démocratie ? Photo © Patrick Willemarck

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Lecture 6 min.

Si tu n’as pas une Rolex à 50 ans, t’es un raté.
Pendant des années, nos sociétés occidentales ont progressé au fur et à mesure de l'enrichissement de la classe moyenne en rêves  que la société de consommation rendait insidieusement de plus en plus attractifs et accessibles. Un jour, un  fameux publicitaire et conseiller en communication de Présidents de la République française a d'ailleurs conclu : « si t’a pas une Rolex à 50 ans, t’as un raté. » T’es un loser. Or, les parts de marchés de Rolex dans le monde en nombre d’unités vendues sont minimes. Nous sommes loin d’une consommation de masse. La classe moyenne ne peut pas se le permettre. Voilà donc une classe de ratés qui  se compose d’individus, les mainstreamers, fondamentalement conservateurs, qui ne souhaitent pas le changement tant ils veulent préserver leur petit bonheur quotidien, leur famille, leur pension, leur maison, leur foyer et leurs aspirations. 

Ni Rolex ni job ni pension…
Le mainstreamer sait qu’il n’aura pas de Rolex tout comme il sait qu’il n’aura bientôt peut-être plus de job, ni de pension, ni d’allocation de chômage ni de soins de santé, ni de chance de faire étudier la médecine à son fils, etc. Parce que cela, vrai ou faux, c’est ce qui fait la une de l’actualité et le bonheur des démagogues en plus de la dette. Les États croulent sous leur dette. Et personne n’attire l’attention sur le nombre de sociétés capitalistes qui accumulent des dettes dans leurs bilans sans jamais les rembourser. Mais l'État, ce n’est pas bien, ils doivent rembourser. Et le mainstreamer qui a tous les mois, le souci de boucler son budget, comprend bien cela. Personne n’ira lui expliquer qu’on ne gère pas le budget de l’état comme on gère le budget du ménage.

La classe moyenne s’appauvrit de ses rêves déçus et cela la rend triste. Quand elle entend parler des concentrations de richesse chez 1% de la population, elle sent une forme de rage poindre en elle. C’est l’opportunité que saisissent les démagogues et que les mainstreamers suivent parce qu’ils font écho à leur appauvrissement à leurs peurs, à leur tristesse. L’écho sert de preuve d’empathie. Sous des apparences de leaders, ils se présentent en sauveur auquel le mainstreamer pourra se raccrocher le temps d’essuyer quelques larmes de colère. Et tant pis s’il faut mentir, tricher ou forcer les choses, ce qui compte pour le démagogue, c’est le pouvoir. La classe moyenne est devenue une classe entière de perdants, pas forcément ratés, qui représentent la majorité de l’électorat de nos sociétés.

Les mots déclin, recul, réduction, ceinture, diminution, perte, risque ne sont plus des maux d’exception, mais des mots de leur quotidien qui creusent leurs malheurs et leurs peurs pour qu’y coule le vivier des démagogues. Dans toute société, il y a des gagnants et des perdants, mais quand les perdants sont majoritaires, les choses se corsent. Comment leur expliquer et leur faire comprendre qu’ils sont les victimes de trois lames de fond qui changent le monde, la globalisation, la financialisation et la technologisation ? Trois lames qui n’ont pas été anticipées parce qu’elles se sont développées et imposées plus vite que le temps nécessaire à penser leurs effets et forger une éthique politique. C’est ce qui se dit.

Globalisation, Financialisation, Technologisation, les 3 causes de nos malheurs ?
On aurait pu éviter les effets désastreux de ces trois lames. Avec des subsides, avec des investissements, avec des formations, avec l’éducation. Elles datent toutes d'il y a plus de trente ans. Combien d'usines automobiles ont été fermées ces dix dernières années alors qu'on me l'annonçait déjà dans mes cours d'économie, il y a quarante ans ? Mais ça ne rapporte pas de voix le long terme ni les universités en qui on voit des donneurs de leçons alors qu'ils cherchent à comprendre le monde et éclairer les solutions. Ça ne fait pas le poids face aux promesses des démagogues. Vive les emplâtres sur les jambes de bois. La crise dans laquelle se trouve la classe moyenne et par conséquent, la démocratie n’est pas une fatalité. C’est un choix. Un choix des élus qui auraient pu vouloir autre chose et un choix des électeurs désarmés parce que la société de consommation leur a appris à consommer la démocratie au-lieu d'agir en citoyen.  Quand je vote pour quelqu’un, c’est comme si j’achetais un remède miracle. Et si le miracle ne se produit pas, c’est que les politiques sont tous pourris.

Le vrai leader est à l’opposé du démagogue. Il maximise le potentiel humain. Mais nos partis politiques ne font plus ça. Ils ont des bases, des membres et des permanences, mais combien sont-ils ? Combien de permanences ne sont-elles pas des chambres de lamentation où l’électeur vient pleurer ? Ce sont souvent devenus des lieux où on tente de maximiser le pouvoir du politique au lieu de celui du citoyen. Un temple où s’ entretient l’idée que l’homme politique est providentiel et qu’il est la solution. Il minimise le potentiel de l’électeur qui le consulte. Et plus il cumule de fonctions, plus il valorise son potentiel d'homme providentiel au détriment du citoyen. Parce que l'homme providentiel n'existe pas plus que dieu.

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Le leader politique doit donner plus de pouvoir au peuple et tout faire pour réduire l’attrait du démagogue. Mais on préfère protéger les taxis et condamner Uber, protéger les hôtels et condamner Airbnb. Nos politiques se sont laissé séduire par la démagogie. Et nous en sommes les victimes consentantes. Commes les Cubains qui ont vu émerger Fidel Castro en leader qui est devenu démagogue alors que Cuba n'est pas encore une démocratie.

Bon, ce n’est que mon avis et je le partage en espérant que certains politiques résisteront à cette fatalité démagogique qui semble inexorable dans l'histoire quand la majorité est perdante. Faites mentir l'histoire. L'avenir en a besoin.

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